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Exilés et soins psychiques
Suivre et soigner les patients exilés confronte à des questions particulières dont témoignent, depuis leurs différents cadres d’interventions, les intervenants du social ou du soin auprès de ces personnes qui cumulent de nombreux facteurs de « vulnérabilité » .
Les questions psychiques y tiennent une grande place [1] et leur prise en charge se heurte à des difficultés dont témoignent nombre d’acteurs de la psychiatrie publique ou privée, des centres spécialisés auprès d’étrangers ou de victimes de persécutions politiques et torture, des structures dédiées aux personnes en grande précarité (EMPP - équipes mobile psychiatrie précarité) et des multiples associations [2].
Les pratiques du terrain auprès de ces personnes interrogent l’écart séparant les réalités cliniques et thérapeutiques des représentations habituelles du soin et des recommandations générales.
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Sortie du confinement, De l’importance des liens maintenus…
3 septembre 2020, par François Journet
De l’importance des liens maintenus…
Nombre d’intervenants et structures accueillant des patients en exil ont témoigné largement de leurs graves difficultés durant le confinement..
Par exemple, le Centre Primo Lévi dans une lettre hebdomadaire a décrit ces suivis à « distance », quand les systèmes de communication et l’intimité pour un échange thérapeutique manquent aux patients, où la priorité était de trouver et fournir hébergement et nourriture. Version en période d’urgence sanitaire d’une « clinique (...)
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Suivis d’exilés au début du confinement
4 avril 2020, par François Journet
1- Sans abri
« Ai-je le droit de sortir ? » demande-t-il au téléphone, après trois contrôles au deuxième jour du confinement. Sans attestation, lui qui vit dans la rue, il n’a pas été, lui, verbalisé.
Je le crois affolé. A moins que l’affolement ne soit ma propre impuissance face à sa demande : il n’a rien à manger et se trouve à 70 km du cabinet. Je pourrais l’aider ponctuellement sans difficulté grâce à une caisse associative créée pour aider les patients en précarité, mais venir frise aujourd’hui (...)
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L’hiver d’un étranger malade avant les Assises du Printemps
19 janvier 2020, par François Journet
Janvier 2020
1- Un homme blessé
Débouté de sa demande d’asile quelques jours avant, ce jeune patient annonce calmement en juin qu’il ne vivra pas comme un chien, sans abri ni droit de travail. Inutile d’en dire plus, la voie ferrée est proche du lieu d’hébergement qu’il sait devoir quitter très vite. Sa résolution inquiète. Le suivi est intensifié. L’idée première est de lui signifier sa place, ici, au cabinet : il compte comme humain, justifie l’attention du soignant. La décision des juges ne détermine (...)
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L’été de l’exilé en France
10 novembre 2019, par François Journet
La chronique précédente questionnait cette « temporalité du demandeur d’asile » , faite d’échéances redoutables et attendues dans un délai a priori imminent mais incertain. Un temps contraignant le suivi « psy » (ou médical) du demandeur d’asile, sans doute, mais qui en pratique n’interdit pas, pour peu que l’on considère les difficultés, un soin dans la durée, comme le démontrent ces patients, qui, dans nos campagnes franchissent monts et vallées pour venir en consultation. Ce faisant, ils valident l’atteinte (...)
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La « temporalité » de l’exilé demandeur d’asile
27 mai 2019, par François Journet
1 Vingt ans, grand, très mince, visage d’enfant. Il oublie tout, les rendez-vous, ce qu’il devait faire, le temps de passer d’une pièce à l’autre. Il ne dort qu’à peine, cauchemarde sans cesse, a des maux de tête incessants. Terrorisé à la vue d’un policier, il n’ose pas sortir seul.
Dans son pays, il a été violenté, incarcéré dans des conditions « inhumaines », obligé de fuir en urgence après sa libération obtenue par corruption par sa mère : il ne doit pas réapparaître au pays. Sa mère, au cœur de ses (...)
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Le soin psychique aux exilés est-il une spécialité ? Un livre d’histoire de l’ethnopsychiatrie aide à penser la question
28 avril 2019, par François Journet
1- Détresse d’une personne en exil et confiance
Une femme d’une quarantaine d’année consulte auprès d’un psychiatre pour une souffrance psychique intense, complexe, perturbant sa relation au monde. Elle ne parle pas Français mais n’accepte pas la seule interprète pouvant intervenir, déjà rencontrée ailleurs et avec un ressenti négatif. Elle préfère se confier directement en anglais ou dans un Français débutant au psychiatre qui, de son côté, ne connaît guère plus le pays d’origine de Madame que l’Anglais, (...)
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Contexte général du soin aux exilés : la question migratoire (François Héran, Catherine Withol de Wenden)
30 mars 2019, par François Journet
Accueillir et suivre des demandeurs d’asile ou déboutés, bouleverse. Nombre d’intervenants du champ social ou du soin témoignent du trouble, parfois violent, ressenti dans une clinique où les patients ne sont pas « seuls », mais avec un univers qui fait problème : un contexte sociojuridique oppressant .
Ce contexte détermine ou écrase les singularités, produit une grande précarité au niveau symbolique (en termes d’identité, de reconnaissance) et au niveau matériel (conditions économiques limitées par le (...)
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Cette rubrique est inspirée par une pratique...
27 janvier 2019, par François Journet
Cette rubrique est inspirée par une pratique en psychiatrie de ville avec de nombreux « migrants » en souffrance, rencontrés et suivis durant leur parcours en France : à la période critique de la demande d’asile, succède une évolution conditionnée par l’accueil ou le refus de cette demande, à l’origine de conditions juridiques et/ou de précarité que ne peut ignorer le soin, pour des personnes ne pouvant concevoir un retour au pays d’origine. Cette rubrique propose d’aborder ce thème de soins psychiques (...)
[1] Comme le montre le rapport d’activité du COMEDE pour 2018 qui montre que 38% des patients suivis au Centre de Santé de Bicêtre à Paris le sont pour troubles psychiques.