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Le site des recherches fondées sur les pratiques psychothérapiques

Éditorial Avril 2013

Pratiques fondées sur la preuve et autisme

Jean-Michel THURIN

Dans un article de 2011, "Evidence-Based Practices and Autism. Autism 2011 ; 15 (1): 114-133", Gary Mesibov et Victoria Shea abordent le concept de pratiques fondées sur la preuve, les questions qu'il pose dans le champ de l'autisme et les réponses qui peuvent leur être apportées .

Cet article est très actuel et nous avons le plaisir d’y retrouver beaucoup de points communs avec ce qui a été à l’origine et ce qui sous-tend le fonctionnement du Réseau de recherches fondées sur les pratiques psychothérapiques, notamment dans son pôle autisme. Nous le présentons en détail.

Dans une première partie, les auteurs présentent l’histoire des concepts de fondement sur la preuve en Psychologie et en éducation,

Concernant la psychologie, GM et VS rappellent d'abord les raisons qui ont conduit l'Association Américaine de Psychologie (APA) à s'impliquer dans l'évaluation des psychothérapies : défendre ce traitement par rapport aux psychotropes et répondre aux demandes des systèmes assurantiels ; établir des critères à partir desquels un traitement peut être considéré comme "bien établi" et "probablement efficace. Ces critères ont conduit la division 12 de l'APA, qui s'était investie dans cette tâche, à établir en 1995 une liste de "traitements validés par la recherche", liste qui a été remise à jour en 1998.

Quasi immédiatement, de fortes critiques ont porté sur cette procédure. Mais dans le même temps, les différentes approches ont commencé à souscrire à ces recommandations. La division 12 commença à reculer en 2001, décida de se transformer en Comité Science et Pratiques et de différer toute nouvelle revue des thérapies validées jusqu'à ce qu'un manuel pour l'évaluation des traitements soit élaboré et adopté.

En 2005, le président de l'APA (R. Levant) constitua une "Task Force" pour établir une définition des Pratiques Fondées sur la Preuve en Psychologie (Evidence-based Practice) . Le rapport, dont on trouvera ici la traduction intégrale en français, fut présenté et adopté en 2006.

En ce qui concerne le champ de l'éducation, qui est le second registre impliqué dans la prise en charge de l'autisme, les choses se sont déroulées différemment. C'est le gouvernement des EU qui a introduit directement par le concept de "Recherche Fondée Scientifiquement" (Scientifically Based Research). Ce concept a été intégré en 2006 dans les recommandations pour "l'Amélioration de l'Éducation des Individus présentant des Handicaps" ( ). Ces recommandations sont prises en compte dans le choix et le financement de l'éducation ordinaire et spécialisée. Le terme "scientifiquement" inclut que la recherche répond à 6 critères présentés en annexe.

Les critères prônés pour l'éducation ont produit au moins autant de critiques que ceux initialement conçus en psychologie.

Dans une seconde partie, les auteurs présentent l'histoire de l'application des concepts fondés sur la preuve dans le champ de l'autisme.

Après une période durant laquelle l'autisme était ignoré dans les revues d'interventions validées, différents groupes ont fait la revue de différentes littératures, en utilisant différentes définitions de la preuve et en considérant différents niveaux de spécificité. Cela a conduit, comme on pouvait s'y attendre, à des conclusions différentes.

Il n'y a ainsi pas d'accord dans le champ sur ce qui constitue un traitement efficace, de façon démontrée, pour l'ensemble des personnes souffrant d'autisme.

La recherche constitue un garde fou face aux spéculations sur la causalité de l'autisme et à certaines pressions historiques, philosophiques et politiques qui influencent la façon dont les services sont organisés et délivrés. Cela n'annule pas pour autant le fait que certains critères de la recherche basée sur la preuve puissent être problématiques dans le contexte des interventions relatives à l'autisme. Parmi ces problèmes on peut citer :

En tout état de cause, les études de cas individuels permettent de réaliser des analyses au niveau de la personne, laquelle représente la même unité que celle à laquelle l'intervention a été délivrée. La recherche qualitative est également importante car elle permet de considérer les expériences de la vie réelle et les résultats d'interventions variées.

Un autre aspect important à ne pas méconnaître est l'effet en cascade que peuvent avoir certaines acquisitions (effet pivot) qui produisent un effet additionnel à celui des objectifs comportementaux cibles qui étaient recherchés.

L'approche "développementale, fondée sur la différence individuelle et la relation" de Greenspan et al. (2008) est particulièrement intéressante.

La troisième partie présente les conclusions et recommandations qui peuvent être tirées des observations et constats précédents.

L'inclusion, dans la définition de l'APA, de "l'expertise clinique" et du concept de "traitement individualisé basé sur des facteurs variés relatifs au patient" constitue un guide de grande valeur pour établir le caractère fondé d'un large éventail d'interventions. La méthode d'évaluation des études de Reichow et al. (2008) semble assez appropriée, bien qu'elle ne saisisse pas les facteurs cliniques qui enrichissent la pratique et la vie des patients

L'application à la recherche interventionnelle sur l'autisme des critères spécifiques développés pour les traitements en santé mentale ou pour l'éducation est problématique. Il existe une tendance récente malheureuse qui est de déclarer qu'ils sont la "seule" approche basée sur la preuve scientifiquement prouvée et d'encourager les parents à demander que les fonds publics soient utilisés pour soutenir l'approche en question.

Dans le même temps, la plupart des cliniciens et des éducateurs travaillant avec des personnes souffrant d'autisme sont guidées par des questions telles que : Qu'est-ce qui marche ? Pourquoi cela marche ? Qu'est-ce qui pourrait être fait pour que cela marche mieux ? Qu'est-ce qu'il y a d'autre qui marche ?

Sept recommandations

La conclusion générale des auteurs est que nous devrions reconnaître qu'il y a différentes sources d'information légitimes mais potentiellement conflictuelles. Notre responsabilité est de considérer les formes variées de preuve et de se se faire une idée sur les approches qui semblent les plus raisonnables, en reconnaissant que notre connaissance est imparfaite, que des approches généralement efficaces peuvent échouer et que des approches peu crédibles peuvent parfois réussir, et que tous les principes et techniques d'intervention doivent finalement être ajustés à chaque patient et ensuite évalués pour leur efficacité dans la situation unique qui est la sienne.

1. Mesibov GB & Shea V. Evidence-Based Practices and Autism. Autism 2011 ; 15 (1): 114-133. télécharger l'article

ANNEXES

Les critères initialement exigés par la division 12 de l'APA en 1995 pour décider qu'un traitement est "bien établi" et "probablement efficace"

Les critères de l'EBP en psychologie ont été révisés par l'APA en 2005

Le contenu du concept de "Recherche scientifiquement fondée" dans le champ de l'éducation

 


Dernière mise à jour : 19/09/11 info@techniques-psychotherapiques.org