Sous l'égide de l'IPA (2000) : Une revue ouverte des études de résultat en psychanalyse

"An Open Door Review of Outcome Studies in Psychoanalysis" : rapport préparé par le comité recherche de l'IPA à la demande du Président

Translated from the original English language version with permission of the International Psychoanalytical Association. For details of how to purchase the printed, English language edition of An Open Door Review of Outcome Studies in Psychoanalysis please visit the IPA’s website http://www.ipa.org.uk or email: Publications@ipa.org.uk"

Traduit à partir de la version originale en langue anglaise avec l'autorisation de l'Association Internationale de Psychanalyse. Pour obtenir des détails sur les modalités d'achat de l'édition en langue anglaise de "An Open Door Review of Outcome Studies in Psychoanalysis" veuillez visiter le site Internet de l'API http://www.ipa.org.uk ou adresser un email à : Publications@ipa.org.uk

"

(P. Fonagy : traduction de JM Thurin ©)


Quatrième partie : Descriptions étendues

Études de processus

FRAMES (FRMS)

Dahl, H. & Teller, V. (1994). The Characteristics, identification and application of FRAMES. Psychotherapy Research, 4, 252-274.

Dahl, H. (in press). The voyage of el Rubiyat and the discovery of FRAMES. In R. Bornstein & J. Masling (Eds.), Empirical Studies of the Therapeutic Hour. Washington, DC : American Psychological Association Press.

Bref résumé de l’approche

FRAMES (ou Structures émotionnelles fondamentales répétitives et inadaptées) est un outil de recherche pour évaluer la psychopathologie, le processus thérapeutique, et le résultat du traitement (Dahl & Teller, 1994). Le fondement de cette recherche est un effort de concevoir un système de classification pour les émotions, et une théorie de la fonction des émotions (Dahl, sous presse). La théorie des émotions qui forme la base de FRAMES avance quatre propositions :

a. Les émotions partagent les propriétés de besoins physiques tels que la faim et la sexualité.

b. Un type d’émotions, nommées « émotions Ça », ont des objets, et fonctionnent comme des désirs attirés par ces objets.

c. Un deuxième type d’émotions, les « émotions Moi », fonctionnent comme des croyances sur l’état d’accomplissement ou non de ces désirs.

d. Les émotions Ça et Moi forment ensemble un système de feedback qui fournit une information à propos de nos motivations fondamentales et de leurs résultats. Les émotions Ça (comme l’amour, la surprise, la colère, la peur) fonctionnent comme des désirs appétitifs envers des objets. Si le désir peut être assouvi, le résultat est une émotion Moi Positive (de contentement, de joie). Si le désir ne peut être assouvi, le résultat est une émotion Moi Négative (comme l’anxiété, la dépression). Les émotions Moi fournissent une information en retour sur le statut de tous les désirs significatifs.

Les objectifs de ce programme de recherche sont de développer FRAMES en un système qui : a) peut fournir une description détaillée des structures récurrentes inadaptées de chaque patient, c’est-à-dire comme pathologie du caractère ; b) peut identifier la nature de la contribution du thérapeute et du patient au processus thérapeutique ; et c) peut évaluer le résultat en déterminant le sort de FRAMES à la fin du traitement. La structure spécifique et le contenu du prototype FRAME constituent une hypothèse qui prédit que la même séquence d’événements se reproduira. FRAMES peut générer des prédictions cliniques spécifiques et détaillées qui peuvent être testées et confirmées ou non. Dahl a été capable de démontrer les changements d’un aspect crucial de la structure FRAME, c’est-à-dire qu’il est capable de saisir, à un niveau micro du processus, les aspects clés du changement thérapeutique.

Principaux résultats

Une bonne part de l’effort a été consacrée au développement de méthodes et de procédures pour identifier de manière fiable et vérifier FRAMES. Ces méthodes et procédures ont évolué et se sont multipliées durant les deux dernières décennies, et certaines ont été développées sous forme de thèses de doctorat : la méthode A, ou Généralisation Inductive ; la méthode B de Déduction ; la méthode C, utilisant les Catégories Prédéterminées ; et la D, identifiant les Structures Émotionnelles en utilisant une « carte d’objet » pour suivre la trace des objets successifs dont le patient parle. Ces méthodes ont été appliquées aux retranscriptions mot pour mot des heures de traitements, d’entretiens plus structurés, de comportement relaté et de comportement observé chez des enfants.

FRAMES peut être réactualisé avec différentes personnes dans différents cadres, particulièrement dans l’interaction avec l’analyste. Dans l’analyse retranscrite de Mrs C., un FRAME qui a été identifié était : la patiente a des conflits au travail et veut du soutien ; elle n’attend pas d’être soutenue, et en fait n’obtient pas du soutien parce qu’elle attend de parler à ceux qui pourraient l’aider ; puis elle exprime de l’hostilité. Une autre structure FRAME, exprimée durant trois séances à la fin de la quatrième année de l’analyse de Mrs C. (séances 726-728) a été intitulée Provocation, dans laquelle la patiente cherche à se bagarrer et, soit arrive à trouver une personne qui l’attaque en retour, soit elle s’attaque elle-même et puis semble « satisfaite ». Dahl est capable de décrire deux expressions de FRAME avec le mari de Mme C et puis, la séance suivante, trois jeux de transfert à l’analyste et une répétition dans une association à un roman. Finalement, dans la troisième de ces trois séances, la patiente répète le premier des deux événements (provocation et soit obtenir de la personne une attaque en retour, soit s’attaquer elle-même) avec son mari. Cependant, le troisième événement change, ce n’est plus de la satisfaction mais « très désagréable ». Ce FRAME particulier n’est pas apparu dans aucune des séances suivantes dans l’analyse. Cet exemple illustre comment FRAME peut saisir et spécifier quels sont les aspects des conflits du patient qui changent.

Brève évaluation de cette approche

Une des forces de cette méthode, c’est que la structure et le contenu du prototype constituent une hypothèse qui prédit que la même séquence d’événements se reproduira.
Des exemples de FRAME confirment alors la prédiction. Des prédictions cliniques spécifiques et détaillées peuvent être confirmées ou non. La seconde force, c’est que FRAMES, à l’opposé de certaines autres stratégies de recherche, n’implique pas de catégories pré-établies ou prédéfinies ; ce sont des représentations idiographiques de comportement inadapté. Les catégories d’événements et leur ordre séquentiel sont déterminés par les récits personnels de chaque patient et leur sont spécifiques. De plus, FRAMES peut être appliqué à la fois au comportement relaté et au comportement observé.

Bien qu’une recherche considérable ait été conduite en utilisant FRAMES, le travail est encore à ses débuts et ces méthodes nécessitent d’être appliquées à une série beaucoup plus importante de patients et de types de thérapie pour découvrir les limites et les possibilités de la méthode. La plupart des études ont été jusqu’ici menées sur la psychanalyse de Mrs C . et les efforts d’appliquer FRAMES à des échantillons plus vastes de traitements ne se mettent en route que maintenant. Deuxièmement, FRAMES partage avec d’autres mesures similaires les problèmes généraux d’inférence liés aux jugements de similarité, c’est-à-dire ce qui compte comme étant « le même » désir, la « même » action, émotion ou défense. En l’absence d’études de totale fiabilité, les chercheurs abordent ce problème en rendant public le texte original et chaque item de contenu manifeste qui a été résumé par les prédicats dans les FRAMES, de sorte que chaque lecteur peut juger l’adéquation de la classification. Néanmoins, nous avons besoin d’une stratégie pour produire régulièrement des FRAMES de façon fiable et efficace. Troisièmement, FRAMES partage, avec des mesures similaires, le problème fondamental lié à la spécification de la relation entre les représentations mentales conscientes, celles supposées inconscientes et les processus (Dahl & Teller, 1994).

Une autre limite de ce modèle est qu’il ne comporte aucune théorie explicite sur la façon dont les désirs et les émotions changent. De plus, il ne paraît pas être capable d’établir des relations causales entre les classes particulières d’interventions et le changement du patient. La théorie des émotions semble très associée aux conceptualisations du fonctionnement mental en termes de pulsion et de structure et ne prend pas en compte les aspects interactifs, relationnels ou intersubjectifs des processus de changement qui sont devenus importants dans la théorie psychanalytique contemporaine.


La méthode du thème relationnel conflictuel central (CCRT)

Luborsky, L., Barber, J., & Diguer, J. (1993). The meanings of the narratives told during psychotherapy : The fruits of a new operational unit. Psychotherapy Research, 2, 277-290.

Luborsky, L., & Crits-Christoph, P. (1998). Understanding transference : The core conflictual relationship theme method. (2nd ed.). Washington, DC : American Psychological Assocaiton Press.

Luborsky, L., Popp, C., Luborsky, E., & Mark, D. (1994). The core conflictual relationship theme. Psychotherapy Research, 4, 172-183.

Bref résumé de l’approche

Le CCRT est la plus importante méthode empirique établie qui extrait du matériel clinique la configuration relationnelle centrale des patients. Le transfert du patient est habituellement inféré à partir du matériel des séances de thérapie. Au cours des dernières années, on s’est rendu de plus en plus compte que les systèmes sans guides de formulation du transfert ne sont pas fiables, les analystes expérimentés échouant souvent à se mettre d’accord les uns avec les autres. De plus, la méthode habituelle de formulation du transfert est difficile à évaluer quant à sa fiabilité parce que les formulations de chaque thérapeute peuvent différer à la fois d’un point de vue langagier et d’un point de vue de ses éléments. Au contraire, le CCRT permet l’utilisation d’un même langage et de même éléments. Du fait que le CCRT repose sur des principes de base selon lesquels des cliniciens psychodynamiques expérimentés utilisent typiquement dans la formulation des configurations du transfert, il permet aux juges cliniciens de s’appuyer sur des guides partagés pour faire des inférences.

D’abord, les Épisodes Relationnels (Res) ou récits soi-autre, sont situés dans les récits du patient de ses interactions avec les autres, habituellement dans des retranscriptions mot à mot, bien qu’on ait aussi utilisé des entretiens d’admission plus structurés. Un épisode relationnel est défini comme faisant partie d’une séance dans laquelle il y a un récit clair concernant les relations aux autres, ou parfois à soi. Ces épisodes sont situés et délimités sur la retranscription de la séance par un juge expérimenté. Une fois que les aspects récurrents des épisodes relationnels sont identifiés, ils sont revus avec les questions suivantes à l’esprit : a) Quels sont les désirs des patients ? b) Quelles sont les réponses données par les autres ? c) Quelles sont les réponses données par le soi ? Une autre dimension majeure de cotation est la distinction entre les réponses positives et les réponses négatives. Les réponses négatives sont celles que le patient expérimente comme impliquant de la frustration attendue ou réelle à la satisfaction de ses désirs. Les réponses positives impliquent une satisfaction réelle ou attendue de ses désirs.

La méthode s’est appuyée à l’origine sur des catégories particulières ou des types d’éléments inférés par chaque juge clinicien dans le langage personnel du juge pour décrire les qualités internes de la configuration relationnelle centrale de chaque patient. Plus tard, des catégories standard ont été ajoutées à la méthode, c’est-à-dire une série limitée de catégories qui sont utilisées en commun par tous les juges pour tous les patients. Le juge infère d’abord une catégorie faite sur mesure à partir d’un aspect du récit, et ensuite il le traduit en une ou deux catégories standard. Différentes listes de catégorie ont été compilées au cours des années. La première comprenait 15 catégories pour chaque type d’élément, la seconde en comprenait 30 pour chaque type d’éléments ; les procédures de réduction de données (analyse par segment) ont finalement produit 8 catégories standard pour les désirs, 8 pour les réponses données par les autres et 8 pour les réponses données par le soi. Les fiabilités des catégories standard s’échelonnent de .61 à .70.

Principaux résultats

Au cours des deux dernières décennies, de nombreux articles de recherche et deux livres ont été publiés qui décrivent le CCRT et son développement ainsi que son application. Un effort significatif a été réalisé dans la construction et dans la version améliorée de la méthode CCRT, les catégories standard de Désirs et de Réponses, et dans l’établissement de sa fiabilité et de sa validité (Luborsky & Crits-Christoph, 1998). Le CCRT opérationnalise le transfert d’une manière cliniquement signifiante et cela a eu pour conséquence que des chercheurs d’à peu près partout dans le monde ont adopté la méthode et qu’elle a été traduite dans plusieurs langues. Luborsky et ses collègues ont aussi testé des séries considérables d’hypothèses concernant l’origine, les fonctions et les stimuli qui activent le transfert. Ils incluent les observations que cela implique une configuration relationnelle centrale, que cela a pour origine des figures parentales précoces, que cela vient à impliquer le thérapeute, et que cela fait partie de la conscience (Luborsky & Luborsky, 1995 ; Luborsky, Popp & Barber, 1994a). Dans un autre exemple du type d’étude réalisé avec le CCRT, Popp et ses collègues (1990) ont été capable de démontrer une similitude significative entre CCRT issu des rêves et CCRT issu des récits éveillés, afin de tester l’observation selon laquelle la configuration relationnelle conflictuelle centrale apparaît sous différents modes.

Évaluation brève de l’approche

Le CCRT a fourni un soutien puissant à la recherche pour des théories clé psychanalytiques sur le transfert et est, en tant que tel, une des meilleures démonstrations des possibilités d’opérationnalisation des concepts psychanalytiques sous une forme convenable à la recherche empirique. Il reste proche du matériel clinique et fournit un guide pour l’inférence que les cliniciens trouvent convenable. Il peut être coté de manière fiable même par des juges qui ont eu peu ou aucune formation clinique. Cependant, il n’est pas une mesure du processus thérapeutique, et les implications sur la façon dont les patients (et leurs CCRT) changent reste peu clair. Alors que la méthode devient de plus en plus appliquée dans des pays qui sont différents au niveau culturel et de langue, il y a un souci sur le caractère adéquat du système hiérarchique des catégories standard qui ont été développées aux USA. La recherche est actuellement mise en route dans plusieurs pays pour établir une utilité interculturelle du système de catégorie W, RO, RS (Désir, Réponse des Autres, Réponses de Soi) et pour le modifier si nécessaire.


Théorie du Contrôle-Maîtrise et Méthode de Formulation de Projet (CMT)

Weiss, J., Sampson, H., & and the Mount Zion Psychotherapy Research Group (1986). The psychoanalytic process : theory, clinical observation and empirical research. New York : Guikford Press.

Weiss, J. (1993). How Psychotherapy works. New York : Guiford Press.

Bref résumé de l’approche

La théorie du Contrôle-Maîtrise (Weiss, 1993 ; Weiss & Sampson, 1986) est une approche de type cognitive issue de l’ego-psychologie dont on parle récemment en termes d’orientation théorique psychanalytico-cognitive. La théorie soutient que la psychopathologie provient en grande partie de croyances pathogènes acquises durant l’enfance qui empêchent les patients de poursuivre des objectifs de vie appropriés. Ces croyances sont effrayantes et gênantes et suggèrent que la poursuite de certains objectifs va constituer une menace pour soi ou pour d’autres. Des croyances irrationnelles de pouvoir blesser les autres, des peurs excessives de représailles et des attentes exagérées d’être submergé par des sentiments comme la colère et la peur sont tous des exemples de croyances qui peuvent agir comme des obstacles à la poursuite ou à la réalisation d’objectifs. La théorie suppose que le patient vient en thérapie avec un projet inconscient de réfuter ces « croyances pathogènes » débilitantes. Un des moyens fondamentaux auquel le patient aura recours pour tenter d’infirmer ses croyances pathogènes se trouve dans la relation au thérapeute. L’action thérapeutique consiste à réfuter les croyances pathogènes des patients. La manière avec laquelle un individu travaille en psychothérapie pour confirmer les croyances pathogènes, dépasser les problèmes et atteindre les buts, c’est ce que l’on a appelé « le projet » du patient. Le projet décrit des domaines généraux sur lesquels le patient veut travailler et sur la façon dont le patient va probablement réaliser ce travail (Weiss, 1995). On peut arriver à infirmer les croyances pathogènes par toute une série de moyens, y compris l’attitude générale du thérapeute envers son patient en passant par les tentatives du patient de « tester » où se situe le thérapeute en lien avec les croyances pathogènes, et par l’interprétation. Le modèle a d’importantes implications pour la technique. Weiss (1993) soutient qu’il ne peut pas y avoir d’approche technique générale. La technique doit être spécifique au cas et le thérapeute doit adapter son approche aux croyances et objectifs particuliers de chaque patient.

Les interprétations peuvent être utilisées pour différents buts : passer les tests du patient, l’aider à se sentir plus en sécurité dans la thérapie, tout comme l’aider à devenir conscient de ses objectifs et croyances pathogènes, et donc travailler plus efficacement à infirmer ces croyances et à poursuivre ces buts. Une interprétation qui traduit exactement quelque chose de la vie mentale du patient ne peut pas être aidante si elle n’est pas utile au patient dans ses efforts de dépasser ses croyances pathogènes. Si le thérapeute réussit avec des moyens non interprétatifs à fournir au patient un sentiment de sécurité, les patients peuvent commencer d’eux-mêmes à développer des insights.

Dans ce modèle, le thérapeute n’a pas besoin d’être neutre ; en fait, dans la conception de Weiss (1993), le thérapeute devrait, en général, ne pas être neutre ; au contraire, il devrait servir d’allié au patient dans son effort à réfuter les croyances pathogènes du patient et à poursuivre les objectifs. Weiss souligne que même si le thérapeute essaye d’être neutre, le patient ne fait pas l’expérience de la neutralité du thérapeute, puisque la tendance du patient est de lier tout ce que dit le thérapeute à ses efforts pour infirmer les croyances pathogènes. En fait, l’utilisation réussie par le patient de l’interprétation dépend de la dépendance du patient à l’autorité du thérapeute pour l’aider à faire ce qu’il désire inconsciemment.

Les formulations développées selon cette théorie se décomposent en quatre éléments : les objectifs du patient pour la thérapie ; les obstructions (croyances pathogènes) qui inhibent le patient dans sa poursuite ou sa réalisation de buts ; les insights qui aideront le patient à atteindre les buts de la thérapie ; et la manière avec laquelle le patient va travailler pour dépasser ces obstacles et atteindre ces buts (tests) (Curtis, Silberschatz, Sampson, & Weiss, 1994).

Procédure pour susciter une formulation

La méthode de formulation de projet, comporte cinq étapes :

1. Trois ou quatre juges regardent indépendamment les retranscriptions mot à mot des premières heures de thérapie. Chaque juge crée ensuite des listes de buts « réels » et « alternatifs », des obstructions, des tests et des insights pour le cas.

2. Les listes des juges sont réunies en des listes principales de buts, d’obstructions, de tests et d’insights.

3. Les listes principales sont retournées aux juges cliniciens qui cotent de manière indépendante les items sur une échelle Likert à 5 points pour leur intérêt pour le cas.

4. La fiabilité est mesurée pour chacun des 4 éléments de projet en calculant les alpha pour les cotations mises en commun des juges

5. Une formulation finale est développée par un groupe de juges qui décide par consensus quels items hautement cotés devraient être inclus. La formulation du projet comprend une description du patient et des circonstances de vie actuelles du patient, suivie d’un récit des plaintes que le patient présente. Les buts, les obstructions, les tests et les insights sont ensuite mis en liste. Les fiabilités vont de .84 à .9°

Principaux résultats

La validité de la Méthode de formulation de projet a été testée dans des études dans lesquelles les formulations ont été utilisées pour mesurer l’impact des interventions thérapeutiques sur le progrès du patient en thérapie. Plusieurs études ont démontré que la justesse des interventions du thérapeute (définies comme degré d’adhésion de l’interprétation à la formulation de projet de la personne) prédit un progrès ultérieur du patient en thérapie. Quelques études ont aussi montré que la mesure de résultat du cas-spécifique, la réalisation du projet, qui évalue jusqu’à quel degré le patient a atteint ses objectifs et insights et a dépassé les obstacles identifiés dans sa formulation de projet, est corrélée à d’autres mesures de résultat et est un facteur prédictif du fonctionnement du patient dans le suivi après thérapie. Ces résultats apparaissent soutenir l’hypothèse que la formulation de projet identifie d’importants facteurs qui influencent la nature et le maintien de la psychopathologie du patient. Quand le thérapeute répond en accord avec les projets du patient, cela conduit à une amélioration.

La capacité à développer des formulations de cas fiables en utilisant la Méthode de formulation de projet a permis à ce groupe de comparer systématiquement les théories de la psychothérapie d’une manière qui soit empiriquement et cliniquement signifiante. Weiss (1995), par exemple, a testé deux théories sur l’émergence de contenus mentaux refoulés antérieurement. L’hypothèse du fonctionnement mental le plus haut (HMFH) qui est issue de la théorie de contrôle-maîtrise, a donné que de tels contenus peuvent émerger du fait que le patient décide inconsciemment qu’il peut en faire l’expérience en sécurité. L’hypothèse de fonctionnement automatique (AFH) issue de la théorie structurée classique de la pulsion, suppose qu’ils peuvent se présenter s’ils poussent à travers la conscience du patient ou s’ils sont déguisés ou isolés de sorte qu’ils échappent aux forces de refoulement. La mise à l’essai réussie de cette hypothèse a reposé sur la supposition que le patient se sentirait différent pendant que les contenus mentaux antérieurement refoulés seraient en train d’émerger. Selon le HMFH, le patient devra dépasser son anxiété sur les contenus avant qu’ils ne se présentent et ainsi il ne sentira pas particulièrement anxieux lorsqu’ils émergeront. Le AFH suppose que si les contenus mentaux refoulés antérieurement émergent, le patient sentira une angoisse accrue, à moins qu’ils ne soient déguisés ou isolés. Cette hypothèse a été testée en utilisant l’analyse transcrite de Mme C. avec des juges déterminant quels contenus étaient écartés et appliquant des cotations de l’angoisse. L’hypothèse du fonctionnement mental le pus élevé a été confirmé. Une série d’études, dont beaucoup ont été publiées, certaines sont des thèses de doctorat non publiées, ont testé systématiquement différentes prédictions issues de la théorie contrôle-maîtrise (voir Weiss, 1995 ; Weiss & Sampson, 1986).

Brève évaluation de l’approche

Une des forces réelles de ce programme de recherche est qu’il essaye de tester systématiquement la théorie ; en même temps, il est pertinent du point de vue clinique, promettant d’offrir de nouveaux insights sur la façon dont la psychothérapie promeut le changement du patient. Au contraire de nombreuses recherches en psychothérapie, qui tendent à ne pas avoir directement un effet sur la façon dont l’intervention clinique devrait être menée, ce travail a des implications claires et immédiates sur la façon dont les thérapeutes pourraient travailler efficacement. Ce groupe a un grand dossier de recherche productive et ce travail est en train de gagner une stature internationale.

En général, la stratégie d’investigation est orientée vers une recherche de preuves qui soutienne les hypothèses, plutôt que de les réfuter. Les psychanalystes ont récemment été critiqués pour avoir échoué à élaborer des propositions théoriques d’une façon qui ne soit pas uniquement vérifiable mais réfutable. Dans une seule étude, par exemple, une comparaison de la Formulation de projet avec le CCRT de Luborsky, tout comme avec d’autres méthodes de formulation pour un seul patient a révélé des différentes spectaculaires d’une grande importance clinique (Curtis et coll., 1994 ; Luborsky et coll. , 1994a). Cela a démontré qu’il peut y avoir d’importantes différences entre des formulations même si elles partagent un vaste cadre psychanalytique et utilisent des méthodes fiables. Les chercheurs en contrôle-maîtrise remarquent explicitement que l’application de cette méthode nécessite un groupe central de chercheurs qui partagent une orientation théorique commune et qui ont été capables d’identifer et d’opérationnaliser ses principes de base. La méthode de formulation de projet a été développée pour créer des perspectives fiables d’un cas particulier à partir d’une orientation théorique particulière. Néanmoins, cela n’aborde pas le problème de vérifier ou de réfuter les hypothèses et les formulations cliniques issues de perspectives théoriques rivales.


Analyse de configuration et modèles de relations de rôle (CARR)

Horowitz, M. J. (1995). Defensive control states and person schemas. In T. Shapiro & &R.N. Emde (Eds.), Research in psychoanalysis : Process, development, outcome (pp. 67-89). Madison, Connecticut : International Universities Press.

Horowitz, M. J., Eells, T. Singer, J., & Salovey, P. (1995). Role-relationship models for case formulation. Archives of General Psychiatry, 52, 625-632.

Horowitz, M. J., & Stinson, C. H. (1995). Consciousness and the processes of control. Journal of Psychotherapy Practice and Research, 4, 123-139.

Bref résumé de l’approche

Jusqu’à récemment, les théories cliniques, les formulations psychologiques des patients et les inférences au sujet de leurs processus mentaux ne pouvaient être évalués qu’officieusement. De telles évaluations reposaient nécessairement en grande partie sur la compréhension et le jugement cliniques. D’importantes démarches sont désormais effectuées avec pour tâche redoutable de tester, de façon scientifiquement acceptable, les inférences et les hypothèses faites régulièrement en pratique clinique sur les processus mentaux des patients. La méthode de Mardi Horowitz et de ses collègues qui produit des formulations psychologiques fiables et reproductibles, est un des nombreux exemples importants de ce développement. Toutes ces approches appliquent un cadre organisateur à des concepts spécifiques et saisissent des structures répétitives de motivation, de cognition, d’émotion ou de transactions interpersonnelles.

La méthode de Configuration du Modèle de Relation de Rôle est issue d’un programme considérable de recherche et d'une série de publications, durant les dix dernières années, qui sont apparues pour présenter ce modèle et ses fondements théoriques. Un effort significatif a clairement été investi dans le développement de cette approche pour le diagnostic et la formulation, qui représente une étape supplémentaire dans la tentative en cours d’opérationnaliser des concepts cliniques complexes et subtils. Sous-jacente à cette nouvelle approche de la formulation du cas, il existe une tentative ambitieuse de créer une nouvelle théorie de l’esprit qui emprunte des concepts, une terminologie et des métaphores de la théorie psychanalytique, des sciences cognitives et des modèles de traitement de l’information. Néanmoins, elle reste préliminaire à maints égards : a) dans son hypothèse suivant laquelle les sciences cognitives et la théorie psychanalytique ont été suffisamment intégrées pour permettre une application clinique directe ; b) dans ses implications pour la conduite de la psychothérapie ; et c) d’un point de vue méthodologique, en termes d’adéquation et de possibilité de reproduction de ses méthodes empiriques.

Le concept central de cette approche de la formulation de cas est celui de schémas qui sont définis comme des « structures de signification» qui affectent la pensée, le projet et l’action pour soi et les autres. Les schémas sont : le traitement inconscient et en partie préconscient ; ils organisent les processus de contrôle des émotions au cours du temps ; ils aident à former l’expérience consciente ; ce sont des structures de croyances (conscientes) ; ils sont « soi » et « autre » dans de multiples combinaisons ; ce sont des scénarios d'enchaînements d’action ; et ce sont des formes de connaissance qui coordonnent les caractéristiques de la perception, de la pensée, de l’émotion et de l’action.

Les Modèles de Relation de Rôle (RRMs) sont une méthode d'identification des schémas, leur donnant un cadre organisateur et les présentant schématiquement. Les RRMs saisissent les attributs du soi (tels qu’ils sont vus par le soi) et les attributs des autres personnes. Ils incluent aussi un scénario de l’interaction attendue entre soi et l’autre. En bref, la façon dont nous nous comportons ou agissons envers les autres dépend de la façon dont nous nous considérons nous-mêmes en relation à l’autre personne. La façon dont nous faisons l’expérience d’un événement qui survient dans la réalité dépend du schéma latent de la personne et qui est activé par l’événement.

Résultats principaux

Horowitz (Horowitz et coll. 1995) soutient avec justesse que le diagnostic des troubles de la personnalité ne représente qu’une première étape vers le traitement et que la bonne formulation est essentielle à l’efficacité de la thérapie. L’analyse de la configuration et le RRMCs sont une méthode de formulation spécifique. Un des objectifs de cette recherche est alors d’identifier les relations spécifiques entre le RRMs et les diagnostics de troubles de la personnalité de l’axe II du DSM. Cette méthode nécessite un enregistrement vidéo ou une retranscription d’un entretien d’évaluation ou d’une séance de thérapie. La première étape dans la création d’un RRM nécessite l’identification d’incohérences systématiques dans les mots qu’un patient utilise pour se décrire. Bien que les critères et la procédure d’identification des incohérences ne soient pas expliqués clairement, on peut apparemment accomplir cette tâche de manière fiable. Dans un exemple (Horowitz et coll., 1995) deux équipes indépendantes créent leurs propres configurations RRM. Une équipe arrive à un RRM « patient malade de timidité » ; l’autre équipe produit « gêné socialement ». Ces formulations ont été estimées « proches de manière acceptable ». Les formulations sont représentées par plusieurs chiffres, diagrammes et graphiques de cycles illustrant le RRMC du patient.
Dans un compte-rendu qui décrit en détail une étude fiable, la procédure qui y est présentée a nécessité d’évaluer le taux d’accord parmi un comité de juges cliniques en appariant les RRMCs avec quatre patients dont les séances de thérapie enregistrées en vidéo étaient observées. La fiabilité pour ces quatre cas a été décrite « assez bonne à mauvaise ». De plus, alors que cette procédure évalue l’accord parmi les cliniciens concernant le point jusqu'au quel (conceptualisé antérieurement) les RRMC ont bien fonctionné avec quels patients, elle n’aborde pas le problème plus difficile de déterminer si les RRMs peuvent être construits sérieusement en premier lieu en utilisant le format RRM pour produire librement des configurations pour les patients.

Une hypothèse importante semble être que les troubles de l’identité sont habituels à tous les troubles de la personnalité. Un présupposé central de la méthode RRM, est que la perturbation de l’identité peut être évaluée à partir d’affirmations contradictoires sur soi. La méthode RRM nécessite des jugements sur les troubles de l’identité ou sur les contradictions internes à l’individu chez les patients qui se décrivent comme étant différents dans des situations différentes. D’un point de vue pragmatique, il n’est pas facile de juger de l’incohérence parmi des descriptions des patients d’eux-mêmes et, de plus, on ne peut conclure que de telles incohérences indiquent la présence d’un trouble de la personnalité.

Évaluation brève de l’approche

La méthode RRM tente d’aborder un problème important pour la science clinique. Elle est créative, complexe et intéressante. L’effort d’intégrer la théorie psychanalytique aux modèles des sciences cognitives et au traitement de l’information produit parfois une terminologie qui est utilisée sans référent spécifique, et des conceptualisations qui sont souvent vagues d’une manière déconcertante. Le problème de la confusion conceptuelle et de l’ambiguïté peut être vu dans la définition des différentes catégories et des différents concepts, et des relations entre ces entités. Le langage difficile frappe comme une tentative forcée de greffer certaines idées des sciences cognitives et de l’intelligence artificielle sur la théorie psychanalytique, comme l’est l’invocation de modèles de passage et d'organigrammes de traitement de l’information.

La description de la symptomatologie des troubles de la personnalité et la théorisation de la motivation sous-jacente du comportement semblent simplifiées à l’excès, peut-être dans une tentative d’adapter de telles descriptions à des contraintes nécessairement inhérentes aux configurations RRM. C’est aussi comme si tous les troubles de la personnalité étaient semblables et ne variaient les uns des autres qu’en termes de contenu spécifique de « modèle de configuration de relation de rôle ». Horowitz soutient que les troubles de l’identité et des relations interpersonnelles sont des marques de troubles de la personnalité. Le seul trouble de la personnalité qui inclut « des perturbations de l’identité » comme un des critères est le trouble de la personnalité état-limite. La plupart des chercheurs qui ont étudié les traits composants, ou du moins descriptifs des différents troubles de la personnalité n’incluent pas le trouble d’identité ou la diffusion parmi leurs critères. Les implications du traitement des formulations issues du RRMC ne sont pas claires. Comment un RRMC pourrait-il informer l’approche d’un cas pour un thérapeute ? Est-ce qu’il aiderait par exemple à trouver une manière plus systématique de juger quand faire une intervention ou comment élaborer une interprétation ?


Multiple Code Theory and the Referential Cycle (MCT)

Bucci, W. (1993). The development of emotional meaning in free association. In J. Gedo & A. Wilson (Eds.), Hierarchical Conceptions in Psychoanalysis (pp.3-47). New York: Guilford Press.

Bucci, W. (1997). Patterns of discourse in 'good' and troubled hours: A multiple code theory. Journal of the American Psychoanalytic Association, 45, 155-187.

Bucci, W. (1997). Psychoanalysis and Cognitive Science: A Multiple Code Theory. New York:Guilford Press.

Bref résumé de l'approche

La théorie du code multiple, qui est issue de la pensée et de la recherche en sciences cognitives, prétend fournir le cadre d’un modèle général du processus thérapeutique. Le concept central à cette théorie est l’Activité Référentielle, et le Cycle Référentiel Connexe. Le concept d’activité référentielle (RA) indique l’activité des liens référentiels entre les systèmes non verbaux et le code verbal de communication. La méthodologie implique l’utilisation de mesures de langage ou cotation du discours du patient suivant le degré avec lequel il est lié ou non à l’expérience non verbale, émotionnelle. La mesure du processus référentiel repose en premier lieu sur une mesure assistée par ordinateur de l’Activité Référentielle (ou CRA) qui évalue le degré avec lequel ceux qui parlent sont capables de traduire l’expérience émotionnelle en langage et en une forme qui soit capable d’évoquer l’expérience correspondante chez celui qui écoute. Le RA mesure la concrétude, la spécificité, la clarté et le niveau d’images du discours et tend à être au plus haut dans le discours narratif.

L’activité référentielle implique trois phases :

a) une phase initiale dans laquelle le processus non verbal subsymbolique est dominant ; les schémas émotionnels sont éveillés mais le patient n’est cependant pas capable de les transformer pleinement en une forme verbale ;

b) une phase symbolique, dans laquelle le schéma émotionnel est exprimé sous forme narrative, caractéristiquement comme un épisode sur l’individu en relation à une autre personne ;

c) une phase de réflexion dans laquelle la signification émotionnelle du discours est examinée.

Si le processus est efficace, cela va sans doute conduire à l’éveil de nouveaux schémas émotionnels et au commencement d’un nouveau cycle. Le CRA est supposé être au plus haut dans la phase narrative du cycle référentiel, au plus bas dans la phase d’excitation subsymbolique, et relativement bas ou plus variable dans la période de réflexion et d’exploration de la signification.

Le travail actuel de Bucci utilise trois listes de mots de base pour modéliser les phases du cycle référentiel ou de symbolisation : le Ton Émotionnel (ET), l’abstraction (AB) et l’Activité Référentielle mesurée par ordinateur (CRA). Les listes de mots correspondent aux retranscriptions des séances, et le nombre de mots correspondant et leur proportion de décompte total de mot sont calculés.

Principaux résultats

Le centre d’intérêt de cette recherche a été porté sur le développement et la validation de la méthode : déterminer la taille des unités de score et développer des dictionnaires pour ET, AB et RA. Les mesures RA, qu’elles soient cotées par des juges ou par ordinateur, ont été appliquées à de nombreux types de textes, y compris de brefs monologues, des souvenirs précoces, des protocoles de TAT et des retranscriptions de séances de thérapies. Dans une série de thèses, on a trouvé que des sujets hauts dans le RA ont de plus grande expérience d’images, et sont cotés comme plus intuitifs et utilisent plus de mouvements de mains adaptés au rythme et d’intonation de configurations de discours. Le RA est en dessous de la série normale pour les patients qui sont cliniquement dépressifs et s’améliore lors de la rémission et des corrélations ont été faites entre la fluctuation du RA et les mesures d’excitation émotionnelle et physiologique. La fluctuation RA a été reliée aux mesures de réponses du thérapeute et aux réponses du patient à l’interprétation du transfert.

Dans une application de ces méthodes aux transcriptions souvent étudiées de la psychanalyse de Mrs C, Bucci (Bucci, 1997&) a rapporté que Mrs C. a montré une « diminution générale de l’expression émotionnelle au cours des six ans de son traitement, comme cela est reflété aux niveaux et du CRA et du ET, et que le style de son langage devient plus intellectualisé et plus abstrait, comme cela est reflété dans l’augmentation au niveau du AB (p. 172). » C'est en gros la conclusion opposée atteinte par d’autres enquêteurs psychanalystes qui ont étudié Mrs C., comme Jones & Windholtz (1990) et Weiss & Sampson (1986). Ces chercheurs ont trouvé que Mrs C. avait tiré un grand bénéfice de son analyse, et que son discours était devenu moins intellectualisé et moins dominé par la rationalisation et reflétait de plus en plus un plus grand accès à sa vie émotionnelle. Spence, Dahl et Jones (1993), qui ont utilisé un autre type d’analyse de contenu assisté par ordinateur, ont aussi démontré que l’association libre de Mrs C. augmentait de manière significative au cours du traitement.

Brève évaluation de l’approche

La majeure partie du travail s’est centrée sur le développement de la méthode, particulièrement les mesures assistées par ordinateur du RA, ET et AW. Il y a encore des questions sans réponses sur la validité du concept d’Activité Référentielle : qu’est-ce que le RA mesure donc ? Le CRA est composé d’un dictionnaire de 250 mots à peu près qui sont identifiés par un programme ordinateur. Plus ces mots sont trouvés dans le texte du patient et dans le discours de l’analyste, plus le score sur le RA est haut. Un certain nombre de résultats contradictoires sont apparus dans le travail, tout comme avec ceux d’autres chercheurs. Par exemple, le RA ne se corrèle pas à d’autres mesures de processus fiables qui ont été utilisés depuis longtemps comme l’Échelle d’expérience du patient, qui ne se corrèle pas non plus avec le ET ou le AW.

L’utilisation de procédures assistées par ordinateur se fonde sur le préalable suivant : les significations sont exprimées de manière redondante dans le langage et sont largement portées par les mots particuliers, indépendants de la forme syntaxique ou du contexte. Le CRA et les mesures qui s’y rapportent sont des exemples de codage du contenu classique. Cette stratégie est conçue pour fournir une description objective, systématique et quantitative du contenu manifeste de la communication. Cependant, il s’y rajoute des questions de validité. Les mots singuliers (listes du dictionnaire) sont comptés sans considérer le contexte dans lequel ils surviennent. Bien que ce programme de recherche ait essayé d’aborder cette question par un certain nombre d’études de validité, les problèmes restent entiers. Par exemple, Bucci affirme que des preuves préliminaires soutiennent le fait que le processus référentiel se manifeste dans des cycles survenant naturellement, alors que le RA en même temps est corrélé aux interprétations de transfert et aux récits des épisodes relationnels, événements qui ne surviennent pas de façon cyclique. La stratégie classique de codage de contenu ne fait pas bien l’affaire pour saisir de manière adéquate la complexité et l’infinité contextuelle du langage parlé naturel.

Commentaires et Corrections : Wilma Bucci, 14 juillet 1999

Le rapport de mon travail dans « Open Door Review » a été édité sans que l’on me donne l’occasion de le réviser. Dans ce document, je répondraià plusieurs erreurs majeures énoncées dans le rapport. Je soumettrai aussi, à une date ultérieure, une ébauche de révision de mon travail qui, j’espère, sera substituée au premier travail apparu.

D’abord, il y a un sérieux oubli de citation. Les mesures ET et AB ont été développées par Erhard Mergenthaler à l’Université d’Ulm dans le contexte théorique de son modèle des cycles thérapeutiques ; puis elles ont été ensuite appliquées à la mesure du processus référentiel : le CRA a été développé conjointement par Mergenthaler et par Bucci.

Venons-en aux questions conceptuelles. Il y a plusieurs caractéristiques majeures à mon programme de recherche qui le différencient d’autres approches et qui ne sont pas traitées dans ce rapport :

D’abord, on devrait souligner que le mien n’est pas un programme de recherche traditionnel sur la psychothérapie. La recherche est dirigée vers le développement d’une théorie psychologique générale, la théorie du codage multiple et du processus référentiel, tout comme vers l’examen de son application dans le processus thérapeutique. La théorie fournit un cadre théorique ou un réseau nomologique pour l’examen de ce processus. Dans ce cadre, les concepts théoriques sont définis et les procédures de mesure sont développées et appliquées ; l’application des mesures retransmet un examen supplémentaire et l’élaboration de la théorie.

Deuxièmement, ma recherche se centre directement sur le processus dans les séances, plutôt qu’elle ne fournit des mesures pour les séances dans leur totalité, comme, par exemple, dans le PPQS de Jones. Dans le contexte du modèle théorique et avec l’application des mesures de style de langage par ordinateur assisté, nous sommes capables de regarder directement l’interaction entre l’analyste et le patient dans le discours thérapeutique, et de faire cela dans un grand nombre de séances complètes. J’ai exposé brièvement un modèle à trois phases du processus thérapeutique, en termes de « processus référentiel », en commençant par l’excitation d’un schéma d’émotion dissociée, qui est alors symbolisé sous forme narrative, par exemple, un récit d’un événement récent, un souvenir, une fantaisie ou un rêve ou un événement ici et maintenant, dans la relation ; le nouveau matériel se reflète alors sur le discours thérapeutique. De manière optimale, de nouvelles connexions sont faites pour et à l’intérieur du schéma dissocié, et le processus se répète à un niveau plus profond. J’ai aussi donné les grandes lignes de la nature différentielle des interactions thérapeutiques aux trois phases du processus et j’ai commencé à examiner le processus référentiel de l’analyste comme cela se manifeste dans son écoute et dans la production d’une intervention. Les mesures de style de langage n’ont pas la prétention d’autonomie mais d’être utilisée dans un réseau d’autres mesures qui évaluent le contenu clinique, y compris les mesures des thèmes centraux et des mesures de défense. Les procédures assistées par ordinateur désignent dans la séance, des aspects particuliers du processus surviennent : des mesures de contenu sont appliquées pour nous dire ce qui arrive.

Avec cela à l’esprit, revenons aux commentaires du critique en ce qui concerne les résultats contradictoires dans la recherche. Le critique affirme : « Bucci défend l'idée que les preuves préliminaires soutiennent le fait que le processus référentiel se manifeste dans des cycles survenant naturellement, alors qu’en même temps il montre que le RA est corrélé aux interprétations de transfert et aux récits des épisodes relationnels, événements qui ne surviennent pas de façon cyclique. »

D’abord, je remarque que nous ne faisons pas la distinction dans cette recherche entre le transfert et les autres interprétations, de sorte que l’affirmation est simplement incorrecte à cet égard. Deuxièmement, je ne sais simplement pas ce que le critique veut dire quand il dit que le RA est « corrélé aux » interprétations de transfert. Notre résultat, désormais largement validé, est que les interventions du thérapeute ou de l’analyste tendent à se concentrer en suivant le pic CRA du patient. Nous ne regardions pas la corrélation mais la relation de phase dans la séance. Troisièmement, au-delà de ces simples points de désinformation, je suis curieux de savoir comment le critique a établi que les récits et les interprétations ne montrent pas une certaine configuration répétitive ou une périodicité du type qui est affirmé dans la description du processus référentiel. Ils n’ont pas besoin d’être connus pour montrer une telle périodicité, mais je ne suis pas conscient que la question ait réellement été abordée. J’aimerais en fait spéculer que le RE peut en fait montrer une sorte de périodicité du type que nous affirmons pour la mesure CRA. C’est tout à fait possible que des gens bougent dans et hors d’un mode narratif, selon des modes qui sont déterminés en partie par les interactions du discours thérapeutique et qui ont d’autres déterminants internes aussi bien.

Ensuite, regardons les commentaires du critique en ce qui concerne l’incohérence de nos résultats avec ceux d’autres chercheurs. Il fait remarquer que : « Le RA, ne se corrèle pas, par exemple, à d’autres mesures faibles de processus qui sont utilisées depuis longtemps, comme l’échelle d’expérience du patient. » Ces deux mesures ont été conçues, cependant, pour mesurer des dimensions psychologiques différentes s’appliquant à différentes phases du processus thérapeutique, et l’absence de corrélation était prévisible. Les résultats auxquels se réfère le critique comme étant contradictoires constituent en fait la validation distinctive dans le contexte du cadre théorique du codage multiple et du processus référentiel. Les résultats et leurs implications théoriques ont été présentés par Fretter et coll. (1994). Le critique pourrait avoir appris à ce sujet p. 278 de mon livre.

La question essentielle qui trouble le critique concerne le désaccord de nos résultats avec ceux d’autres chercheurs sur le cas de Mrs C. Le critique affirme que ma conclusion au regard des changements dans sa capacité à exprimer l’expérience émotionnelle au cours des 6 années de son traitement « est essentiellement la conclusion opposée [de celle ?] atteinte par d’autres chercheurs psychanalystes qui ont étudié Mrs C, c’est-à-dire Jones et Windholz (1990) et Weiss et Sampson (1986)». Le critique cite aussi les résultats positifs de Spence, Dahl et Jones (1993), supposément fondés sur un type acceptable d’analyse de contenu par ordinateur, pas le « pauvre travail » employé dans mon travail.

Comme je l’ai dit, mon programme diffère de celui des autres programmes de recherche. J’ai en premier lieu regardé les configurations dans une séance plutôt que les mesures de séance dans leur totalité, et je compare nos mesures de style de langage avec les indicateurs de contenu issus d’autres sources. Les changements dans les contenus cliniques accompagnés d’une augmentations dans le niveau CRA indiquent un lien aux composants sous-jacents du centre affectif ; les changements accompagnés d’une faible CRA ou d’une augmentation AB indiquent un processus plus verbal ou abstrait, motivé, par exemple, par des processus défensifs ou par une compliance à l’interprétation du thérapeute. J’ai fourni des exemples dans le cas de Mrs C, dans lequel les mesures de style de langage reflètent de telles réponses mélangées et de défense à certaines interprétations et j’ai examiné les implications pour le transfert et le contre-transfert. Nous avons désormais développé une preuve supplémentaire pour ces effets dans plusieurs études centrées sur la grossesse de Mrs C et son interprétation dans le traitement.

J’aimerais maintenant aborder la dernière phrase de la critique qui dévalue la méthodologie de ma recherche avec la voix de l’autorité et la présente comme la vision du comité. Le critique affirme : « Le CRA et les mesures en rapport sont des exemples de codages de contenu classiques (sic)… La stratégie de codage de contenu classique fait un pauvre travail de saisir de manière adéquate la complexité et le lien contextuel d’un langage parlé naturel. »

Par où commencer ?

Si le but a été d’ouvrir des questions, des problèmes et des controverses, la dernière phrase aurait pu être quelque chose comme « De nombreux chercheurs soutiennent que … la stratégie fait un pauvre travail de… » ou « Une question importante qui a besoin d’être abordée est de savoir si la stratégie réalise un travail adéquat de… » plutôt que la dévaluation autoritariste et simpliste qui est donnée ici.

Mais au-delà de cela, le fait est que le CRA est une mesure d’un style linguistique s’appliquant à une vaste série de contenus ; ce n’est pas un dictionnaire de contenu, comme le critique peut le lire en détail dans Mergenthaler et Bucci (sous presse). L’approche de codage de contenu, illustrée par le Harvard Third Psychosociological Dictionary avec ses 53 catégories (Stone et coll., 1966) est comprise comme représentant directement les contenus d’un texte, en contenant dans des listes de mot des éléments représentatifs du contenu des aires exprimées. Au contraire, le CRA repose sur « l’approche de marqueur » introduite par Mergenthaler (1996) ; cela souligne une utilisation de dictionnaires qui révèle indirectement les états ou les fonctions sous-jacents au langage, plutôt qu’une quantification de contenus de thèmes. De ce point de vue, une entrée dans un dictionnaire qui correspond à un mot dans le texte analysé est appréhendée comme « un marqueur » ou un indicateur opérationnel, qui nous permet d’inférer de ce contenu manifeste ou du style à l’état sous-jacent. Le CRA se compose de 181 items qui représentent approximativement 50% du langage parlé, sur une large série de contenus ; les items lexicaux dans les listes de mots très fréquents comme des prépositions, des articles, des conjonctions et des pronoms, auxquels on se réfère en linguistique à des mots « fonctions » qui n’ont pas eux-mêmes de contenus ou de référence, mais ont des fonctions grammaticales ou d’organisation dans le discours.

Le CRA peut être regardé plus nettement comme un indicateur de l’émergence du matériel narratif. Les petites séries de mots qui figurent dans le dictionnaire CRA sont les mots que les gens utilisent pour raconter des histoires. Ils fournissent la structure du style narratif, indépendante des contenus spécifiques. Cette affirmation a été soutenue par plusieurs études par notre groupe et par d’autres chercheurs, comme cela a été résumé par Bucci (1999). Notre groupe avance pour aborder des questions supplémentaires et ouvre une nouvelle recherche pour avoir un échange collégial avec d’autres chercheurs, par tout media qui nous soit disponible, au sujet de ces questions et à celles qui s’y rapportent.


Le psychotherapy Process Q-set et la recherche quantitative sur le cas unique (PPQS)

Jones, E. E. (1997). Modes of therapeutic action. International Journal of Psychoanalysis, 78, 1135-1150.

Jones, E. E., Cumming, J. D., & Pulos, S. (1993). Tracing clinical themes across phases of treatment by a Q-set. In N. Miller, L. Luborsky, J. Barber, & J. Docherty (Eds.), Psychodynamic Treatment Research: A Handbook of Clinical Practice (pp. 14-36). New York: Basic Books.

Jones, E. E., Hall, S. A., & Parke, L. A. (1991). The process of change: The Berkeley Psychotherapy Research Group. In L. Beutler & M. Crago (Eds.), Psychotherapy Research: An international review of programmatic studies (pp. 98-107). Washington, DC: American Psychological Association.

Jones, E. E., & Price, P. B. (in press). Interaction structure and change in psychoanalytic therapy. In R. Bornstein & J. Masling (Eds.), Empirical Studies of Psychoanalytic Theories Vol. 8: The Psychoanalytic Process : American Psychological Association Press.

Jones, E. E., & Pulos, S. M. (1993). Comparing the process in psychodynamic and cognitivebehavioural therapies. Journal of Consulting and Clinical Psychology, 61, 306-316.

Bref résumé de l'approche

Une difficulté centrale de la recherche sur le processus psychanalytique se situe dans la conception de méthodes quantitatives qui préservent à la fois la profondeur et la complexité du matériel clinique tout en répondant aux conditions de la science empirique. Une méthode développée par Jones est le Psychotherapy Process Q-Set PQS (Jones et coll., 1991). Le PQS est un instrument de cotation à 100 items conçu pour fournir un langage de base permettant de décrire et de classer des processus de traitement dans une forme appropriée à l'analyse quantitative. Un manuel de codage fournit les définitions des items Q avec des exemples de leur application, et spécifie les règles gouvernant l'usage de l'inférence en réalisant des cotations Q. La plupart des échelles de cotation de processus s'appuient sur des enregistrements de segments brefs de séances de psychothérapie, forçant les juges à évaluer une dimension de pertinence présumée sur la base d'impressions relativement brèves. Par contre, avec la technique Q, c'est une heure entière (enregistrée sous forme audio ou vidéo) qui constitue la trame cotée plutôt qu'un petit segment, ce qui permet d'avoir davantage de possibilités de saisir des événements importants. La méthode Q est flexible en termes de conceptions de recherche et de stratégies de données d'analyse, et elle peut être utilisée dans des conceptions de comparaison de groupe (nomothétiques), dans lesquelles les cotations Q de groupes de cas (ou d'heures) sélectionnés sur une certaine dimension d'intérêt sont comparées, tout comme dans des conceptions idiographiques de cas au singulier (N =1).

Le Projet de Recherche Psychothérapique de Berkeley de Jones ouvre la voie à de nouvelles méthodes de recherche quantitative sur le cas au singulier. Il est peu probable que la psychanalyse et les thérapies longues seront étudiées en utilisant le paradigme prévalent des essais cliniques pour différentes raisons, y compris peut-être les difficultés logistiques insurmontables et le coût de la réalisation d'études contrôlées randomisées. Les conceptions naturalistes sont une alternative réalisable. Le projet est en train de réunir et d'archiver des psychothérapies psychanalytiques longues enregistrées, ce qui est inhabituel en termes d'enregistrements complets pour chaque cas, et les genres d'évaluation qui ont été obtenus durant et après le traitement. Une succession d'études quantitatives de cas uniques ont été extraites afin de générer des descriptions empiriques du processus de psychothérapie psychanalytique en utilisant le PQS ; elles abordent ainsi la question de la façon dont les patients changent en étudiant les relations causales dans ces traitements. Une série d'investigations (Jones et col., 1993 a ; Jones et Price, sous presse ; Pole et Jones, 1998) a utilisé un nouveau modèle pour l'étude de cas au singulier qui prenne en compte l'interaction d'influences ou de variables multiples dans les traitements cliniques en utilisant des approches statistiques par séries temporelles. De façon conventionnelle, les échantillons de patients et le comportement ou la parole du thérapeute sont utilisés comme prédicteurs de résultat, ou pour examiner les différences entre séances ou les contrastes entre thérapies. Peu d'attention est donnée à la façon dont la configuration de l'interaction thérapeutique se modifie au cours des traitements. La stratégie suivie dans cette recherche se distingue des études traditionnelles de processus par sa focalisation sur les configurations de l'interaction patient-thérapeute ("structures d'interaction répétititive - voir ci-dessous) et son exploration de l'association de ces structures avec le changement du patient. La technique P de Luborsky est appliquée aux cotations Q du processus thérapeutique. La technique P est une analyse factorielle de mesures répétées dans la même unité patient-thérapeute afin d'étudier les structures potentielles d'interaction sous-jacentes. L'analyse en séries temporelles, une technique quantitative, est alors utilisée pour évaluer les changements dans le temps en explorant le déploiement temporel des variables. L'analyse en séries temporelles requiert la mesure répétée d'un ensemble de variables sur la durée d'un cas individuel et tente de comprendre les variations temporelles ou les changements dans les scores de certaines de ces variables comme une fonction d'autres variables. Par l'application de ces méthodes, ces chercheurs visent à identifier des liens de causalité entre le processus thérapeutique et le changement du patient.

En plus du développement de méthodes du programme de recherche, cette recherche teste un modèle d'action thérapeutique qui aborde les rôles complémentaires de l'interprétation et de l'interaction. Ce modèle réunit ces polarités dans un nouveau cadre de travail qui met l'accent sur la présence et la signification de configurations répétitives d'interaction dans le déroulement du processus analytique. Son postulat central de structures réitérées d'interaction - répétées, influençant mutuellement les interactions entre l'analyste et le patient - est conçu comme aspect fondamental de l'action thérapeutique. Les structures réitérées d'interaction fournissent une voie de formulation et d'opérationalisation empirique de ces aspects du processus analytique qui ont été dénommés intersubjectivité, activités de transfert-contre transfert, et dynamique de rôles. Dans ce modèle, l'insight et la relation sont inséparables, à partir du moment où la connaissance psychologique de soi ne peuvent se développer que dans le contexte d'un rapport où l'analyste essaye de comprendre l'esprit du patient par l'intermédiaire de leur interaction. Patient et thérapeute interagissent par des voies réitérées ; ces configurations d'interaction dont les changements sont lents reflètent probablement la structure psychologique du patient et du thérapeute, que la structure psychique soit conceptualisée en termes de représentations d'objet ou de formations de compromis et de configurations pulsion-défense. L'action thérapeutique est située dans l'expérience, l'identification, et la compréhension par le patient et le thérapeute de ces interactions réitérées.

Principaux résultats

Plus d'une douzaine d'études utilisant les PQS et terminées identifient des corrélations de processus aux résultats dans des essais cliniques randomisés de traitements psychodynamiques brefs et cognitivo-comportementaux. Une étude comparant ces deux traitements (Jones et Pulos, 1993) a constaté que la technique psychodynamique a été sensiblement corrélée avec succès dans des traitements psychodynamiques et TCC. Dans une étude de réplication (Ablon et Jones, 1998), des comités d'experts ont développé des prototypes de thérapies psychodynamiques et cognitivo-comportementales en utilisant le PQS. Les prototypes ont été employés pour évaluer à quel point les traitements se sont conformés aux prototypes dans 3 échantillons relativement grands de traitement. Le degré auquel les traitements ont adhéré aux prototypes a été mesuré quantitativement et corrélé aux résultats. Le prototype psychodynamique construit par des experts a été uniformément sensiblement corrélé avec des résultats positifs dans la thérapie psychodynamique et cognitivo-comportementale. Le prototype de CBT n'a pas été uniformément corrélé de façon sensible avec des résultats positifs dans l'un ou l'autre type de thérapie. Une autre étude, issue du programme de recherche fréquemment cité de la NIMH sur le traitement de la dépression (Ablon et Jones, 1999), suggère que même lorsque les traitements sont réalisés à partir d'un manuel, ils peuvent être plus semblables que différents, ce qui soulève la question de l'utilité des essais contrôlés randomisés comparant les types de thérapie.

Une investigation intensive sur le cas psychanalytique souvent étudié de Mme C (Jones et Windholz, 1990) a servi de prototype à l'étude quantitative des traitements à long terme. Des transcriptions in extenso des heures d'analyse ont été évaluées en mode aléatoire par des juges cliniques avec le processus Q-set. Les données-Q résultantes ont fourni une chronique du cours de l'analyse basée sur des catégories descriptives fiables et ont montré des changements importants avec le temps. Au cours de l'analyse, le discours du patient est devenu de moins en moins intellectualisé, plus réflexif, et a montré un plus grand accès à la vie émotive, ainsi qu'une capacité croissante pour l'association libre. Avec le temps l'analyste est devenu, lui aussi, de plus en plus actif en confrontant les perceptions de la réalité du patient, en identifiant les configurations récurrentes dans son expérience ou son comportement, en interprétant les défenses, et en soulignant les sentiments que le patient considérait comme dangereux ou inacceptables. Ces résultats, qui ont montré des changements cruciaux au cours du temps sur différents ensembles d'éléments-Q, n'ont pas répondu à une question : À quoi cet effet pourrait-il être attribué ? Tous les changements pourraient être simplement le résultat du passage du temps. Dans une étude ultérieure du même cas (Spence et autres, 1993) l'analyse des séries temporelles a été employée pour essayer d'identifier des relations de causalité. Les transcriptions des heures ont été marquées par ordinateur avec une mesure d'association libre basée sur la co-occurrence des mots qui sont fortement associés dans l'utilisation normale de langage. En utilisant les items-Q qui ont marqué l'activité du thérapeute, il a pu alors être démontré que des catégories particulières d'intervention ont mené à une augmentation significative de l'activité associative du patient, réfutant de ce fait l'hypothèse qui les changements du processus analytique étaient simplement dus au déroulement du temps.

La façon conventionnelle d'étudier le processus tente d'identifier les voies suivant lesquelles les actions du thérapeute ou la technique influencent le changement du patient. On considère que des influences causales interviennent principalement dans une direction. Dans deux études, Jones et collègues (Jones, Ghannam, Nigg, et Dyer, 1993b ; Pole et Jones, 1998) publient sur un patient souffrant de dépression qui a été vu en thérapie psychodynamique bi-hebdomadaire durant deux ans et demi. On a appliqué une forme d'analyse séquentielle qui peut saisir les processus dans lesquels la causalité est plutôt réciproque que dans une seule direction. Cette analyse des effets causaux en thérapie a montré que le thérapeute et le patient s'influencent mutuellement l'un l'autre. Au cours de la phase de début de la thérapie, les données ont prouvé que le thérapeute jugeait moins, était davantage facilitant et neutre, et que l'affect sévèrement dépressif du patient semble avoir graduellement conduit le thérapeute vers une posture plus activement provocante, émotionnellement réactive et impliquée. Ce changement dans la nature du processus était prédictif de la réduction progressive du niveau des symptômes du patient.

Sur la base de ces résultats, on a présumé la présence "de structures d'action réitérées", et le centre de la recherche s'est décalé sur la possibilité que de telles configurations d'interaction puissent être identifiées, et de tester si elles étaient associées au changement du patient. De nouvelles analyses statistiques des données pour Mme C, enregistrées antérieurement, ont été entreprises pour identifier la présence des structures d'interaction. Les estimations-Q de chacune des heures d'analyse ont été soumises à une analyse factorielle exploratoire, qui a fait apparaître un facteur qui saisissait une telle "structure d'interaction". C'était clairement une interaction interpersonnelle que l'analyste et le patient ont identifiée comme réitérée et se reproduisant. En fait, l'analyste a eu un nom pour cette "structure d'interaction" : Jouer à être stupide. Dans cette interaction réitérée, les pensées de la patiente deviennent vagues et confuses quand elle parle des sentiments sexuels et de son souhait d'exciter les hommes. L'analyste s'est retrouvé parlant plus que d'habitude s'efforçant d'expliquer les problèmes. Le patient a un trouble dans la compréhension de ce que l'analyste dit, démontrant dans l'interaction ce que l'analyste a interprété. L'influence réciproque mutuelle de la qualité de ces structures réitérées d'interaction pourrait être vue dans la façon dont la position du patient a évoqué chez l'analyste sa propre réaction de contre-transfert. Ses interprétations étaient prolongées, soigneusement explicatives, et contenaient une certaine exaspération. Jones présume que c'est l'expérience, la traduction et la compréhension de la signification de telles interactions réitérées qui constituent un composant important de l'action thérapeutique (1997). D'autres études ont trouvé un apppui supplémentaire de la recherche vis à vis de ces hypothèses dans deux cas de thérapie analytique à plus long terme bi-hebdomadaire (Jones et Price, en cours d'impression). Des structures réitérées d'interaction sont formulées comme une construction de relais au cours de la discussion au sujet de la nature de l'action thérapeutique, joignant les effets mutatifs de l'interprétation et de la connaissance psychologique avec ceux de l'interaction interpersonnelle.

Brève évaluation de l'approche

Cette recherche est caractérisée par des approches innovatrices de la conception de la recherche et de l'analyse quantitative aussi bien qu'une appréciation des conceptions modernes du processus psychanalytique. Le développement de méthodes quantitatives de recherche sur le cas singulier, en particulier l'application créatrice de l'analyse statistique des séries temporelles, offre le potentiel d'une identification empirique des liens causaux entre le processus analytique et le changement du patient. Le PQS en lui-même a des propriétés psychométriques saines, une très bonne fiabilité, et il est soutenu par des données de validité solide. La création des "prototypes" de divers genres de processus thérapeutiques utilisant les prises de PQS est prometteuse comme méthode d'évaluation de la présence et de la force d'un processus psychanalytique dans les traitements. Une étude actuelle (Jones et Ablon, en préparation) a pu évaluer, en termes quantitatifs, le point jusqu'où un processus analytique se produit dans les traitements.


Le projet des interventions thérapeutiques Menninger (TRIP)

Gabbard, G. O., Horwitz, L., Allen, J.G., Frieswyk, S., Newsom, G., Colson, D. B., & Coyne, L. (1994). Transference interpretation in the psychotherapy of borderline patients : A high-risk, high-gain phenomenon, Harvard Review of Psychiatry, 2, 59-69.

Horwitz, L., Gabbard, G. O., Allen, J. G., Friewyk, S. H., Colson, D. B., Newson, G.E. & Coyne, L. (1996). Borderline personality disorder : Tailoring the psychotherapy to the patient. Washnington, DC : American Psychiatric Press.

Cela a été une étude de petite envergure mais intensive de trois patients ayant un diagnostic de trouble de la personnalité état-limite, traités en psychothérapie psychanalytique à la Clinique Menninger. Les chercheurs ont exploré la relation entre interprétations et alliance thérapeutique. Des groupes indépendants de coteurs ont étudié les retranscriptions de séances de thérapie enregistrée. Un groupe a étudié les changements dans l’alliance thérapeutique en réponse aux interventions spécifiques, alors que l’autre groupe a coté les interventions elles-mêmes sur la dimension soutien-expressive

Résultats

Les interprétations de transfert ont eu tendance à être plus utiles du point de vue du renforcement de l’alliance thérapeutique si elles étaient utilisées après qu’un travail préparatoire ait été effectué par des interventions de soutien. Les résultats témoignent contre l’à-propos de la dichotomie soutien-expressive qui serait caractéristique de toute thérapie. Les résultats suggèrent qu’une combinaison dynamique des interventions de soutien et expressive peut être plus utile en psychothérapie psychodynamique avec les patients état-limite.

Évaluation

Cela n’a pas été une étude de résultat, cependant elle est utile pour identifier les dimensions du processus qui sont pertinentes pour mesurer les effets de la psychanalyse.

L’étude de Buenos Aires – Étude empirique d’une thérapie psychanalytique réussie de six années d’un patient présentant une anorexie mentale (BAS)

Hagelin, A., Acosta Güemes, S., Tebaldi, R., Hodari, M.E., Weissman, J.C.

Bref résumé

Cette recherche nécessite une étude de séances de psychanalyse enregistrée selon trois variables de base (à l’origine 5) : relations d’objet, angoisse et défenses (les deux variables restantes : changement structural et développement psychosexuel, seront examinées plus tard). Après mûre réflexion, la méthode CCRT de Luborsky « Comprendre le transfert » (Luborsky & Crits-Christoph, 1990) a été choisie comme mesure des relations d’objet. Afin de coter l’angoisse, un outil spécial a été conçu, alliant les théories de l’angoisse de Freud, les conclusions de la recherche ULM et des études locales. Afin d’étudier systématiquement les défenses, on a considéré les conceptions de Freud sur les défenses, les études systématiques de Perry (Perry, Cooper & Michels, 1987 ; Perry, Luborsky, Silberschatz & Popp, 1989 ; Perry & Cooper, 1986) et des études récentes (pas encore publiées). L’association entre ces trois mesures représente la question de recherche d’intérêt central.

Le résultat de la thérapie psychanalytique après presque six années de traitement s’est avéré positif dans trois domaines spécifiques (Kordy, Rad, & Senf, 1988) : symptomatique, de la personnalité et familial et social. L’étude de Buenos Aires a été adaptée et certains outils spéciaux ont été conçus pour étudier ces aspects du cas individuel.

Évaluation

L’étude de processus peut apporter une contribution importante en considérant une combinaison singulière d’un certain nombre de mesures de l’action thérapeutique. Les mesures combinent des mesures nouvellement élaborées avec celles déjà les mieux établies. Le manque d’hypothèses explicitement affirmées représente un défi majeur à cette étude.


L’étude d’Amsterdam des enregistrements de processus (ASPR)

Stoker, J. & Beenen, F. and the Dutch Psychoanalytic Institute (1996) : Outline of a quality monitoring and checking system for longterm (4 or 5 times a week) psychoanalytic treatment. Presentation at the Stuggart Kolleg, February 8-10, 1996

L’accent de cette étude est mis sur la recherche sur le processus et sur le résultat, c’est-à-dire l’évaluation systématique de l’entreprise psychanalytique avant, pendant et après le traitement. Les mesures de processus seront le centre d’intérêt avec le but ultime d’ajouter des arguments empiriques et scientifiques à notre connaissance clinique des facteurs curatifs dans le traitement psychanalytique. L’objectif du projet multicentre (l’étude actuelle en faisant partie), est dans l’introduction de la coopération multicentre pour établir une évaluation structurale systématique de notre pratique psychanalytique quotidienne, alliée à un effort de recherche empirique qui souligne l’affirmation selon laquelle la psychanalyse a sa place parmi les sciences. Un résultat futur concret de toute l’entreprise pourrait être la construction d’un système de surveillance de la qualité (souple) et de vérification pour le traitement psychanalytique.

Échantillon

Les patients seront recrutés par des centres locaux pour des études pilote en utilisant les entretiens AAI et CHAP. Le matériel des entretiens sera traduit et marqué et par ailleurs traité systématiquement par le groupe.

Mesures

Dans l’approche décrite, la première priorité sera de mettre en application les instruments de surveillance de la qualité et de vérification dans les différents centres locaux. À cet égard, le premier choix est l’échelle d’évaluation périodique. Cette liste sera remplie par les analystes plusieurs fois durant le traitement et les données seront rentrées dans l’ordinateur de la Dutch Psychoanalytic Institute pour traiter les données centrales. L’échelle traite :

(a) des caractéristiques générales du traitement (maintien du temps, séances manquées, qualité des séances, résistance) et le contenu du matériel (concernant le corps, les relations romantiques/sexuelles, les relations avec les autres significatifs, les relations d’objet en rapport au contenu inconscient, à la sexualité, l’agressivité en lien à des événements de vie actuel, inconscients, à l’emploi, les questions de sexe/âge, la discussion des paramètres de traitement)
(b) Les aspects prédominants des sentiments de l’analyste envers ou à propos du patient dans les séances de la semaine
(c) Les styles prédominants d’interventions de l’analyste dans ces séances de la semaine.

Résultats

En développant et en mettant en application les instruments décrits, il semble possible d’évaluer plus systématiquement et par conséquent de manière plus fiable, les changements de l’esprit, surtout l’effet du traitement sur le développement du fonctionnement mental que la psychanalyse a en tête. Se centrer sur ces changements avec les mesures nouvellement adaptées durant et après le traitement peut nous fournir une nouvelle « fenêtre » sur le processus psychanalytique. L’application de l’échelle d’évaluation périodique peut aussi lier les activités que les analystes disent faire (d’une manière plus systématisée et standardisée) aux changements que les patients montrent durant et après le traitement.


Dernière mise à jour : 19/12/05
info@techniques-psychotherapiques.org