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Espace Cliniciens

Présentation et commentaire de l’article de Levy R, Ablon JS : « La recherche en psychanalyse : progrès et processus »*

(*paru dans Psychoanalyst Psychologist, 2000 ; 23-5)

par Brigitte Lapeyronnie

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Cet article expose l’orientation de ces deux cliniciens et la proposition qu’ils font d’un travail en réseau. Cliniciens chercheurs, cliniciens non chercheurs et chercheurs peuvent s’interpeller. Nous pouvons suivre leurs travaux à l’adresse internet suivante :
http://www.mgh.harvard.edu/endowment/third.asp?page=research&page2=researchpub

Si nous ouvrons la semaine avec cet article, c’est pour donner un appui à une discussion qui nous tient à coeur : devons-nous, pouvons-nous nous lancer dans la recherche ? Pourquoi ? Et si oui, comment ?
Si les auteurs de cet article s’adressent à des psychanalystes, nous pouvons étendre leurs propos à tous les psychothérapeutes.

« Nous croyons réaliser un travail utile à nos patients »

Telle est la conviction de Levy et Ablon et sans doute celle de nombreux cliniciens qui pratiquent quotidiennement des psychothérapie psychanalytiques. Seulement, voilà, cette appréciation est remise en question par la communauté et même bafouée. Jusqu’à présent, nous ne pouvions parler que d’acte de foi, car c’est notre pratique clinique qui nous montrait que ce que nous faisions était utile. Nous n’avions jusqu’à récemment aucune « preuve scientifique » de cette utilité. Là où un glissement peut s’opérer, c’est entre utilité et efficacité. À ce sujet, nous vous renvoyons aux articles déjà mis en ligne et aux discussions sur les notions d’efficacité, de preuves, d’evidence-based practice, etc. Qu’en est-il de ces deux termes « utilité » et « efficacité » ? Je peux croire que le travail réalisé avec une personne lui est utile dans la mesure où elle peut par exemple se maintenir dans une vie hors les murs de l’hôpital, ses symptômes étant toujours là ou à minima. Que se passerait-il sans ce travail ?La notion d’efficacité introduit une dimension supplémentaire : celle d’un effet que l’on peut mesurer sur différentes variables qui caractérisent le patient et qui est plus important que celui de l’évolution naturelle des choses.

« En tant que cliniciens d’orientation psychodynamique et psychanalytique, cette rubrique reflète de notre part un désir tardif d’examiner l’idée, clarifiée par la recherche, que nous croyons réaliser un travail utile à nos patients. Nous espérons que cette rubrique sera le support pour les cliniciens qui ne sont pas chercheurs de poser des questions et de donner leurs opinions sur la recherche en général et sur les efforts spécifiques de la recherche qui seront décrits ici au fur et à mesure. Nous avons le projet que ces chercheurs qui sont engagés dans un travail pertinent pour les cliniciens psychanalystes et psychodynamiques, décrivent leurs études et leurs résultats ainsi que les hypothèses sous-jacentes et les directions de recherches futures. »

La psychanalyse ne constitue plus la référence des traitements en santé mentale

Levy et Ablon donnent aussi quelques éléments du changement de contexte pour comprendre comment l’orientation psychanalytique qui prédominait est en train d’être mise à l’écart. Seule une action déterminée auprès des cliniciens, des patients, des assurances et des décideurs peut renverser cette évolution.

« Nous sommes tous certainement conscients du contexte qui a changé et dans lequel nous pratiquons actuellement. Les idées psychanalytiques et donc les pratiques ne sont plus acceptées comme la référence de traitement dans la communauté de la santé mentale. Nous, comme d’autres, croyons que notre volonté d’enseigner à nous-mêmes, à nos patients, aux compagnies d’assurance et aux décideurs politiques la valeur de nos idées et de nos traitements par l’intermédiaire de la recherche scientifique, apportera une contribution majeure au rétablissement du rôle de la psychanalyse au sein de la communauté. Nous espérons aussi renforcer les programmes de formation en décrivant les programmes existants qui intègrent les initiatives de recherche pertinentes à la pensée psychanalytique associé au travail clinique et à la supervision. »

Quels sont les principaux facteurs de cette évolution ?

Les auteurs en retiennent trois principaux : les avancées en neurosciences et l’accent mis sur les facteurs biologiques ; le « managed care » ; le retard des cliniciens d’orientation psychanalytique à s’inscrire dans la recherche scientifique.

Plusieurs facteurs ont contribué au changement radical dans l’acceptation, le statut et le caractère essentiel des principes psychanalytiques. D’abord, les avancées en neurosciences ont conduit à renforcer l’accent mis sur les facteurs biologiques dans la détresse psychologique et psychiatrique avec l’accent mis en même temps sur la pharmacologie comme remède. Deuxièmement, l’augmentation de la gestion du soin avec son accent mis sur les traitements brefs effectués par des cliniciens moins formés et moins chers a rendu la thérapie psychanalytique et psychodynamique moins accessible et moins acceptée par les usagers, les décideurs politiques et ceux qui tiennent les cordons de la bourse dans l’industrie des assurances. Troisièmement, à l’époque où seuls l’empirisme et les « thérapies validées empiriquement » sont considérées légitimes, nous cliniciens d’orientation psychanalytique avons tout juste commencé à entrer dans le monde de la recherche. Notre espoir, c’est que cette rubrique serve de lieu de rassemblement pour discuter entre ceux qui sont pour et ceux qui sont contre les approches de recherche pour acquérir la connaissance scientifique sur ce que nous faisons cliniquement. La recherche a pour objectif de regarder encore une fois ce que nous tenons pour vrai tout en cherchant ce qui n’est pas connu. Plusieurs raisons psychologiques et idéologiques peuvent expliquer pourquoi les efforts de la recherche au sein de la psychanalyse ont pris autant de temps pour émerger. »

Les objectifs de la recherche et les résistances qui la concernent

Une parenthèse ici pour souligner que l’objectif de la recherche ne se limite pas à des contingences stratégiques, quelles que soient leur importance : « La recherche a pour objectif de regarder encore une fois ce que nous tenons pour vrai tout en cherchant ce qui n’est pas connu. » Deux axes donc : d’une part ce que nous tenons pour vrai, est-ce toujours possible de le tenir pour vrai et deuxièmement, laissons-nous surprendre ! Le vocabulaire employé par les auteurs montre qu’ils sont bien dans une perspective de recherche et non dans une perspective de dogmatisme. Il ne s’agit pas en effet de prouver une Vérité avec un grand V, mais de regarder attentivement nos pratiques et de continuer à être en mouvement et non arrivés en un lieu de toute-puissance fantasmée.

« S’embarquer dans la recherche pour étayer de manière empirique les interventions et les techniques spécifiques de traitement tout comme pour déterminer quels sont les problèmes psychologiques qui sont les plus sensibles au traitement psychanalytique implique que nous devons prendre notre place parmi d’autres formes de traitements visant à soulager la détresse émotionnelle. C’est peut-être douloureux après une époque dans laquelle les idées psychanalytiques étaient les plus acceptées dans ce domaine et étaient par conséquent utilisées dans la conduite de la plupart des traitements. De plus, les résultats de la recherche peuvent tout à fait menacer les croyances tenues et les styles d’interaction et de relation à nos patients.

Bien que nous en accueillions bien sûr les résultats, nous sommes sans aucun doute en même temps perturbés et mal à l’aise par ces possibilités. Peut-être ce qui est le plus puissant, la bonne recherche qui est désormais proposée nécessite de nous, en tant que cliniciens, d’être observés, souvent en vidéo ou par enregistrements audio. Nous avons besoin d’avoir envie d’être les sujets de nos propres recherches ! Traditionnellement, les patients ont été étudiés, mais ce n’est que derrière des portes bien fermées en supervision que nous avons bien voulu nous permettre d’être vulnérables et alors seulement en choisissant d’apporter des notes de processus ou des aspects de ceux-ci à la relation. Quand nous avons commencé notre programme de recherche à l’Hôpital Général de Massachusetts (MGH), nous avons du confronter, individuellement et collectivement, notre résistance à être observés de manière si proche et sans sélection. À des degrés divers, notre narcissisme, notre self de thérapeute était menacé et nous étions inquiets que les résultats de notre recherche exigent que nous changions de comportement et de style en tant que thérapeute ».

Levy et Ablon mettent le doigt sur un point sensible. Le type de recherche, et nous y reviendrons, que l’on peut effectuer pour les thérapies psychanalytiques ou relationnelles (bona fide) doit être avant tout qualitatif. Et une des modalités c’est effectivement l’enregistrement des séances donnant le maximum accès à ce qui se passe dans la relation thérapeutique. Ce type de recherche nécessite donc de mettre notre narcissisme à l’épreuve du regard critique d’autrui. D’autant plus que des études ont montré que dans nos bureaux respectifs, aucun thérapeute ne suit totalement le modèle théorique auquel il se réfère. Effectivement, nous pourrions interpréter cela comme un « défaut » du thérapeute, mais nous pouvons aussi le regarder comme un moment créatif nécessaire de la part du thérapeute, un Now Moment comme pourrait le qualifier Daniel Stern et qui n’est pas du n’importe quoi non plus. Voici d’autres arguments qui ont permis aux auteurs de « sauter le pas ».

« Nous croyons que c’est parce que nous avons vu la valeur de la recherche pour la communauté psychanalytique que nous nous sommes demandé de tolérer l’angoisse initiale d’être observé et étudié de si près. Nous sommes en train de créer un groupe de confiance de cliniciens, y compris les étudiants en psychologie et en psychiatrie qui sont nos supervisés du moment, pour écouter et discuter les enregistrements audio des séances de thérapie comme faisant partie de l’étude actuelle du traitement de l’attaque de panique. Il y a maintenant de bons instruments pour mesurer les variables qui nous intéressent en tant que cliniciens psychodynamiques. Les instruments mesurant l’alliance, les variables du processus, les relations d’objet, l’attachement et les mécanismes de défense sont disponibles ».
Effectivement, toute une panoplie de moyens pour étudier la relation thérapeutique est à disposition (souvent en anglais). La plupart de ces moyens est répertoriée dans le rapport INSERM, avec quelques éléments d’appréciation, travail de titan réalisé par Jean-Michel Thurin. Ces moyens sont bien sûr critiquables et perfectibles, mais ils existent.

Développer des méthodes alternatives dans l’évaluation de résultat : un enjeu majeur pour la communauté psychanalytique

« Il y a aussi des raisons professionnelles et idéologiques à l’ambivalence de notre communauté envers la recherche. La plupart des psychologues d’orientation psychanalytique ont été prudents quant à la réalisation d’une recherche empirique car elle semble trop réductionniste à vouloir essayer de quantifier des concepts aussi complexes que le résultat d’une psychothérapie ou le processus d’une psychothérapie, c’est-à-dire l’interaction entre patient et thérapeute. Les études de résultat de psychothérapie ont tendance à conceptualiser le résultat uniquement en termes de réduction des symptômes type DSM. Par ailleurs, les psychothérapeutes d’esprit psychanalytique ont certainement des objectifs plus grands pour leurs patients. Pour cette raison, il est impératif que la communauté psychanalytique prenne un rôle actif dans le développement de méthodes alternatives dans l’évaluation du résultat des traitements qui exploitent les dimensions de ce à quoi on se réfère lorsqu’on parle de changement structural. Par exemple, il y a des études en cours sur des psychothérapies qui utilisent des tests projectifs et des états des lieux des relations d’objet comme mesures de résultat. Les mesures typiques d’interaction patient-thérapeute ont été limitées en se centrant essentiellement sur la technique du thérapeute et sur d’autres qualités du thérapeute et du patient pris isolément de leur contexte d’interaction. Heureusement, les psychologues psychanalystes ont travaillé dur pendant des décennies à créer des mesures complexes des processus de psychothérapie qui décrivent l’expérience subjective de la relation thérapeutique de manière signifiante cliniquement et cependant en termes empiriques, relation qui est influencée à la fois par les caractéristiques du thérapeute et celles du patient et de leur interaction (cf. Jones, 1985 ; Luborsky & Crits- Christoph, 1990). Ces outils nous permettent d’étudier la psychothérapie d’une manière valable écologiquement et qui soit fidèle aux buts du traitement psychanalytique. »
Faire de la recherche est forcément réductionniste, aucun doute là-dessus. Nous le savons. Est-ce pour autant que cela enlève tout sens à la recherche ? Il y aura toujours quelque chose qui échappe, toujours quelque chose dont ne saurons parler. Et alors ? Sachant cela, nous pouvons espérer rester humbles… Mais devant la simplification inévitable de toute recherche, « chaque étude d’efficacité doit conserver suffisamment de complexité pour permettre une avancée » dit Sherwood Waldron1. Nous devons donc inventer ou utiliser des protocoles d’étude qui tiennent compte de la complexité de ce que nous étudions.

La question des manuels

« Un autre point où le traitement psychanalytique et la recherche en psychothérapie ont eu tendance à être en conflit l’un avec l’autre, c’est la question des traitements selon un manuel pratique. La plupart des études de résultat en psychothérapie repose sur des manuels pratiques de traitement qui décrivent les techniques qui sont à utiliser en cours de traitement. En réalité, seules les thérapies qui ont ces guides qui décrivent leur approche sont reconnues par la communauté scientifique comme « les traitements validés empiriquement » (EVTs). Les études de résultat qui utilisent les guides de traitement font l’hypothèse qu’il est possible pour les thérapeutes de pratiquer uniquement les techniques décrites dans le manuel pratique de traitement de sorte que le changement du patient puisse être attribué directement à ces techniques. Cependant, la recherche sur le processus et pas seulement du résultat de la psychothérapie psychanalytique commence à dissiper le mythe selon lequel il est possible de mettre sous forme de manuel pratique et de contrôler totalement l’interaction complexe entre patient et thérapeute. Par exemple, dans une étude récente sur le processus d’une psychothérapie brève, Ablon & Jones (1998) ont montré que les thérapeutes psychodynamiques tout comme les thérapeutes cognitivo-comportementalistes empruntent de nombreuses techniques de chacune des approches même quand ils essayent de se conformer à un manuel pratique de traitement. Ce travail a démontré de manière empirique que le traitement psychodynamique est particulièrement exhaustif offrant de nombreuses interventions cognitives et comportementales en plus du travail psychodynamique traditionnel. De plus, nous avons montré que les patients répondent favorablement quand les thérapeutes congitivo-comportementalistes sont capables d’encourager certains processus psychodynamiques au cours de leurs traitements.

En tant que cliniciens, nous savons que dans la pratique réelle clinique en dehors du laboratoire de recherche, les thérapeutes n’adhèrent pas strictement à une seule approche. Peut-être encore plus important, nous savons qu’on ne peut pas attendre des manuels pratiques de traitement de pouvoir anticiper la grande variabilité de l’expérience subjective de la relation thérapeutique qui est singulière à chaque dyade thérapeutique. La recherche empirique conduite par les psychologues psychanalystes soutient ces notions et amène la communauté scientifique à réexaminer comment la psychothérapie est étudiée. Par exemple Ablon et Jones ont utilisé les résultats de recherche pour discuter de l’importance d’étudier ce qu’on appelle les « designs » naturalistes. Les méthodologies naturalistes examinent la psychothérapie telle qu’elle est menée en dehors des laboratoires de recherche. Au contraire de la conception la plus habituelle des études de recherche, les études naturalistes ont pour objectif de donner peu de restrictions sur les types de patients qui sont inclus ou sur les façons dont les thérapeutes choisissent de conduire leurs traitements. Nous étudions le traitement tel qu’un thérapeute le conduit naturellement comme il le ferait en dehors de toute étude de recherche ».
La psychanalyse tout comme toute thérapie relationnelle ne peut se caricaturer à une série de conseils mis sous forme de guide de bonne pratique. Certes, la tentative de décrire les objectifs et les grandes étapes de la psychothérapie de quelques troubles apporte des éléments qui peuvent être utiles dans la pratique et pour la recherche. Mais les guides de bonne pratique servant de référence et donnant l’impression que la thérapie est reproductible quel que soit le patient et quel que soit le thérapeute ne conviennent pas aux psychothérapies complexes qui s’adaptent en permanence aux caractéristiques actuelles. Alors, comment aborder la recherche en psychanalyse et en psychothérapie relationnelle ? La première méthode évoquée ci-dessus est l’étude naturaliste. C’est une méthode basée sur l’observation et qui explore une question ou une hypothèse en situation thérapeutique et non en laboratoire. C’est une méthode qui tient compte de la réalité pratique, du contexte. Une autre méthode (qui peut être alliée à la première) est celle de l’étude de cas.

La place des études de cas

« Les études de cas représentent une autre méthode importante d’examen des nuances de la rencontre psychothérapeutique unique à chaque dyade thérapeute-patient. Les descriptions qualitatives des études de cas ont joué un rôle essentiel dans la communication des idées dans la littérature psychodynamique. Ces résultats peuvent être enrichis par l’application de mesures empiriques aux cas uniques pour suivre à la trace le développement du processus psychothérapeutique au cours du temps et pour relier directement ces changements au résultat de la thérapie pour le patient (cf. Jones et coll. 1993, Weiss, 1993). Les recherches traditionnelles font en général une moyenne des données des groupes de patients quand elles essayent de démontrer qu’un traitement particulier marche. Cependant, l’information essentielle sur la façon complexe dont marche un traitement est perdue quand on regarde les données du groupe. Les études de cas complètent les données de groupe en amplifiant au microscope le pouvoir de résolution et en permettant des analyses fines de l’interaction entre un patient particulier et un thérapeute particulier. »

La recherche sur le processus : une réponse psychanalytique aux différents guides

« Alors que nous ne pouvons pas et ne voulons pas espérer contrôler et mettre sous forme de manuel le processus de psychothérapie, il est possible d’utiliser la recherche pour décrire ce qui se passe entre un thérapeute et un patient dans la psychothérapie psychanalytique. La recherche sur le processus peut en fait être la réponse psychanalytique aux différents guides de traitement. Plutôt que de prescrire ce qui devrait se faire en thérapie, la recherche sur le processus décrit ce qui est fait quand on nous laisse, nous, thérapeutes, nous débrouiller tout seuls. Un livre attendu avec impatience d’un psychologue psychanalyste et chercheur est actuellement sous presse et fournit des idées directrices générales de psychothérapie psychanalytique à long terme, issues d’une recherche systématique sur le processus à partir d’archives de traitements (Jones, sous presse2). Le livre représente comment la recherche peut avancer en psychothérapie psychanalytique, en aidant à décrire le processus de thérapie en termes empiriques, mais cependant accessibles. Les chercheurs peuvent aussi aller vers la nouvelle étape qui consiste à lier le processus au résultat pour déterminer ce qui de la rencontre thérapeutique prédit le changement positif du patient au cours du temps. Alors que la recherche de résultat répond à la question de savoir si un traitement marche, la recherche de processus essaye de répondre à la question, de loin la plus intéressante, de savoir comment cela fonctionne ».

Présenter des arguments pour le traitement psychanalytique au sein du contexte scientifique nécessite des moyens

« Nombreux sont ceux en psychanalyse qui croient que nous aurions tort de retarder plus longtemps le développement d’initiatives fortes de recherche. L’Association Psychanalytique Américaine finance actuellement des projets de recherche, y compris le nôtre au MGH, qui est décrit plus loin. Quand l’International Journal a récemment soutenu « les programmes intensifs de formation à la recherche », 80 demandes subventionnées ont été reçues en deux mois, du monde entier. Dans un article récent dans le Journal of American Psychoanalytic Association, Gunderson et Gabbard affirment que « … on a besoin de la preuve empirique en ce qui concerne l’efficacité du traitement psychanalytique ». Leur but est « de présenter des arguments pour le traitement psychanalytique au sein du contexte scientifique ». Nous croyons que cela peut être réalisé en utilisant des méthodes de recherche qui soient cohérentes avec les principes et les intérêts de la psychanalyse. Pour illustrer, nous allons décrire le processus et le résultat de l’étude sur le traitement de l’attaque de panique au programme de recherche en psychothérapie psychodynamique à l’Hôpital Général Massachusetts à Boston.

Nous sommes financés actuellement par l’American Psychoanalytic Association pour conduire une étude pilote de deux-ans sur la psychothérapie psychodynamique de patients dont le diagnostic est le trouble panique. Nous étudions à la fois le résultat et le processus dans une conception naturaliste (pas de traitement guidé par un manuel) dans laquelle cinq à sept psychothérapeutes psychodynamiques voient des patients pour vingt à vingt-cinq séances en utilisant les styles thérapeutiques auxquels ils sont chacun habitués. Les prototypes de processus de thérapie (Ablon & Jones, 1998) sont utilisés pour confirmer que les styles thérapeutiques se conforment au traitement psychodynamique. La mesure du processus, le Psychotherapy Process Q-sort (Jones, 1985) est utilisé quand les traitements sont achevés. Nous utilisons des juges indépendants qui sont formés au Q-sort et qui écouteront un échantillon sélectionné d’enregistrements audio pour coter le processus. Nous utilisons une échelle de relations d’objet (Westen, 1999) tout comme des mesures plus traditionnelles de symptômes et de fonctionnement dans la vie pour évaluer le résultat. Le résultat est mesuré à partir de la perspective du patient, du thérapeute et d’un observateur indépendant. Nous nous intéressons particulièrement au groupe des variables du processus qui contribue au résultat positif. Pour soutenir cette étude, nous avons une rencontre clinique deux fois par mois pour écouter les enregistrements et discuter des traitements tout comme pour déterminer les similitudes et les différences dans cette population particulière de patients. Nous espérons donner le rapport préliminaire des résultats dans cette rubrique prochainement.

Les idées de cette rubrique, les discussions de recherche, les commentaires sur notre et d’autres recherches spécifiques sont les bienvenues et peuvent nous être adressées par mail au rlevy2@partners.org et à sablon@partners.org »
Nous voyons que Ablon et Levy utilisent différentes méthodes d’appréciation de leur travail en même temps et qu’ils s’intéressent surtout au processus de la thérapie, en essayant de repérer « comment cela fonctionne ».

Raymond A. Levy, Psy. D. J. Stuart Ablon, Ph.D.
Traduction : Brigitte Lapeyronnie

J. Stuart Ablon, Ph.D, est Directeur du Programme de Recherche en Psychothérapie au Service de Psychiatrie au Massachusetts General Hospital et Professeur assistant en psychiatrie au Harvard Medical School.

Ray Levy est Professeur assistant de psychologie au Service de Psychiatrie au Massachusetts General hospital. Il est directeur clinique du programme de Recherche en psychthérapie au MGH et est impliqué dans l’enseignement et la supervision des internes en psychiatrie, en psychologie.

J.S. Ablon et R. Levy sont actuellement co-éditeurs de la Newsletter de la Division 39 (psychanalyse) de l’American Psychological Association.

Références

Ablon, J. S., & Jones, E. E. (1998). How expert clinicians' prototypes of an ideal treatment correlate with outcome in psychodynamic and cognitive-behavioral therapy. Psychotherapy Research, 8(1), 71-83.

Ablon, J. S., & Jones, E. E. (1999). Psychotherapy process in the NIMH Collaborative Study. Journal of Consulting and Clinical Psychology, 67(1), 64-75.

Ablon, J. S., & Jones, E. E. (submitted). Psychotherapy and controlled clinical trials: A square peg and a round hole. American Psychologist. Jones, E. E., Ghannam, J., Nigg, J. T.,

Dyer, J. F. P. (1993). A paradigm for single-case research: The time series study of a long-term psychotherapy for depression. 61, 381-394.

Jones, E. E. (1985). Manual for the psychotherapy process Q-set. University of California, Berkeley: Unpublished manuscript.

Jones, E. E. (in press). Therapeutic Action: A Guide to Psychoanalytic Therapy. Northvale, NJ: Jason Aronson.

Luborsky, L., & Crits-Christoph, P. (1990) Understanding transference: The CCRT method. New York: Basic Books.
Weiss, J. (1993) How psychotherapy works: Process and technique. New York: Guilford.

Notes

[1] Sherwood Waldron : How can we study the efficacy of psychoanalysis ? Psychoanal. Q., vol 66, N°2, 1997, 283-322, traduction Dr. JM Thurin

[2] Enrico E. Jones : Therapeutic Action. A Guide to Psychoanalytic Therapy, Rowman & Littlefield Publishers, 2000

 

 


Dernière mise à jour : 16/11/04
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